Ajouté le: 2 Septembre 2022 L'heure: 15:14

L’obole de la veuve pauvre

L’offrande agréable à Dieu est celle du cœur

(Mc 12/41‑44; Lc 21/1‑4)

La circonstance est fortuite, mais il n’y a pas de hasard pour Dieu, et elle pourrait sembler insignifiante. Mais le Christ, qui observe attentivement les comportements des hommes qui l’environnent, et qui, en tant que Dieu, « sonde les reins et les cœurs »1, saisit toutes les occasions pour donner un enseignement spirituel à Ses Apôtres, qui devront évangéliser le monde entier, ainsi qu’à nous, par l’Évangile.

L’obole de la veuve pauvre

Seuls Saint Marc et Saint Luc rapportent l’évènement, mais la version de Saint Marc est plus complète (Saint Pierre, dont Saint Marc a consigné par écrit l’Évangile qu’il proclamait à Rome, en est un témoin oculaire).

La scène se passe après l’Entrée du Christ à Jérusalem (les Rameaux) et avant la prophétie du Seigneur sur la destruction du Temple et la Fin des temps, et donc peu de temps avant Sa Passion. Le Seigneur est dans un moment terrible, parce que l’antagonisme entre « les Juifs » et Lui est à son comble : Il vit une véritable Passion morale. Il se trouve dans le Temple de Jérusalem, et il Lui faut un grand courage pour continuer à s’y rendre et à y enseigner, car la haine des sanhédrites, qui L’ont déjà condamné à mort, est palpable. Nous savons précisément où cela se passe : c’est dans le parvis2 des femmes3, accessible à tous les Israëlites, hommes, femmes et enfants. Il était immense (pouvant contenir 6 000 personnes) et était au cœur de la religion juive publique, là où se passaient tous les actes rituels publics. C’est probablement pour cette raison que le « Trésor du Temple » s’y trouvait :il y avait 13 « troncs » en forme de chofar (trompette rituelle) où les pèlerins versaient des offrandes en espèces4. Ce trésor était considérable5 parce que, lors des trois grandes fêtes de pèlerinage6 (Pâques, Pentecôte, Soukkot [les Tentes]), il pouvait y avoir de 100 000 à 200 000 pèlerins venant de tout Israël et de la diaspora.

Le Christ est assis7 en face d’un des troncs et observe ce qui se passe : Il voit que la foule vient jeter des monnaies dans le Trésor, dont beaucoup de riches, qui donnent beaucoup d’argent. Comment sait-Il qu’ils sont riches ? Certainement en raison de leurs vêtements luxueux (agrémentés de parures et de bijoux) et de leur comportement. Puis Il voit une « veuve pauvre »8 qui s’approche. Il est probable que les veuves en Israël eussent portés un costume particulier, indiquant leur état de veuve. Quant à la pauvreté, elle se voit d’elle-même. La situation des femmes dans l’Antiquité gréco-romaine, et notamment en Israël, n’était pas enviable : une femme passait de la tutelle de son père à celle de son mari, puis, devenue veuve, à celle de son fils aîné lorsqu’elle avait la chance d’en avoir un. L’Évangile en témoigne dans la résurrection du fils de la veuve de Naïm ; elle pleure tellement qu’elle ne voit pas le Christ. C’est Lui qui la console. Et le Seigneur observe que cette femme pauvre met une offrande très petite dans le tronc : « deux leptes, c’est-à-dire un quart d’as9 » Le lepte était la plus petite monnaie grecque et romaine de bronze, et qui avait très peu de valeur10. Le Christ, qui, par Sa puissance divine, lit dans les cœurs, appelle Ses disciples pour leur donner un enseignement spirituel : Elle a donné plus que tous les autres, car eux ont donné de leur superflu, tandis qu’elle a donné de son nécessaire, « de sa subsistance ».

Quelle leçon spirituelle magnifique donnée aux Apôtres et à toute l’humanité ! Ce n’est pas la valeur numérique du don qui importe, mais l’esprit dans lequel il est fait et ce qu’il représente pour la personne qui le fait. Ici, en l’occurrence, cette veuve pauvre se privait du nécessaire pour le donner à Dieu. C’est un peu comme si elle Lui donnait sa vie. Tandis que les autres ne se privaient de rien en donnant, cela ne leur coûtait pas d’effort. Mais c’est le don de la femme pauvre qui a été agréable à Dieu.

Presque aussitôt après, le Christ va prophétiser la ruine du Temple, qui avait été construit pour L’accueillir, mais qui L’avait rejeté, et qui était donc devenu inutile. Le cœur de cette veuve était devenu le temple de Dieu : il ne sera jamais détruit.

Le Christ n’a pas dit un mot à la veuve, et Il ne s’est pas révélé à elle, parce qu’elle accomplissait la Loi en esprit et qu’elle faisait, sans le savoir, ce que Lui-même enseignait. Son cœur était pur et prêt à recevoir Dieu. Mais, lors de son jugement, après sa mort, le Juste Juge lui a dit : viens à Ma droite avec les justes ; entre dans le Royaume de Mon Père.

P. Noël TANAZACQ, Paris

Notes :

1. Ap. 2/3.
2. « Parvis » est une déformation du terme latin ecclésiastique paradisus (paradis) : espace situé devant un lieu sacré, souvent entouré d’une balustrade ou d’un portique (une colonnade).
3. Au-delà de la superbe porte de Nicanor, se trouvait les parvis des hommes israëlites, très étroit, face à l’autel des sacrifices et au sanctuaire lui-même, mais que personne ne pouvait voir, du parvis des femmes. Ces deux parvis étaient strictement interdits aux païens.
4. Ces dons, appelés « 2e dîme », étaient différents de « l’impôt du Temple » dû par tout israëlite adulte et se montant à un demi-chequel (2 drachmes) par an.
5. Selon Flavius Josèphe, lorsque Pompée prit Jérusalem et entra dans le Temple en 63 avant J-C, le Trésor sacré s’élevait à 2 000 talents (environ 50 Tonnes d’argent).
6. La Loi (Dt 16/16) imposait de faire un pèlerinage à Jérusalem lors des trois grandes fêtes juives (Pâques, Pentecôte et Soukkot [la fêtes des Tentes]). Mais, comme cela était pratiquement impossible, la tradition laissait à chacun la liberté de faire ce qu’il pouvait. Souvent les villages ou les villes y envoyaient une députation pour les représenter.
7. Il y avait des portiques tout autour de la cour, où l’on pouvait s’assoir, ainsi que des locaux de service et des logements pour les prêtres.
8. Et non pas une « pauvre veuve », qui a une connotation misérabiliste. Le texte grec est précis : elle est veuve et pauvre.
9. Dans les textes grec et latin : un « quadrant », c’est-à-dire un quart d’as.
10. La drachme grecque en argent, équivalant au denier romain, constituait le salaire journalier d’un ouvrier. Un denier valait 16 as (de bronze), 64 quadrants et 336 leptes. Le lepte (1,5 g de cuivre rouge) valait donc quelques centimes d’euros de notre époque. (Il n’y avait pas de monnaie juive : ils utilisaient les monnaies grecque et romaine).

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