Publication de la Métropole Orthodoxe Roumaine d'Europe Occidentale et Méridionale
Revue de spiritualité et d'information orthodoxe
Dieu veut le Salut de l’Homme : soustraire l’homme au péché et que les épousailles entre Dieu et la nature humaine puissent se réaliser. L’Évangile raconte comment le Seigneur prépare cet évènement, l’explicitant étape après étape.
La première étape du Saint Évangile selon Saint Marc (Marc 1,1 à 3, 6), Bernard Frinking1 l’a appelée : « L’Immersion » : immersion du divin dans le monde déchu, monde de la mort.
Cette venue révèle un monde tellement différent ! Le contraste est saisissant.
Jésus se montre :
1.Thaumaturge, et opère cinq guérisons : il délivre et un homme et une femme de la révolte contre Dieu, ou non-foi2 ; puis il guérit les membres agents de la chute : l’œil qui a convoité, la démarche qui a conduit à l’objet convoité, et la main qui a saisi3 ;
2.Image d’un Dieu de miséricorde, qu’il manifeste par cinq gestes divins : il pardonne les péchés4 ; il est médecin, venu pour ceux qui se reconnaissent pécheurs5 ; il est le divin fiancé attendu par Israël/l’humanité6 ; Maître du Shabbat, il est capable d’inaugurer les temps nouveaux7 ; et enfin, il manifeste la miséricorde comme supérieure au repos prescrit du Shabbat, en opérant une guérison un jour de Shabbat.8
Dans la même période, il appelle ses cinq premiers disciples, prémices de l’Église.
Mais déjà pointe l’opposition des gens en place qu’il dérange, ceux qui ferment leur cœur et n’ont pas foi, malgré tous les signes révélateurs de sa messianité, voire de sa divinité.
Dans la 2e étape, appelée « l’Appel des Douze », Jésus complète ses Douze disciples et travaille à les former, les préparant à leur mission de ‘pêcheurs d’hommes’. Ils constituent la ‘nouvelle famille’ de Jésus, famille spirituelle, fondement de l’Église.
Face à la calomnie des scribes qui attribuent ses dons de thaumaturge à une connivence avec le diable, Jésus leur enseigne à ne pas se diviser et à mettre toute leur confiance en celui qui sera capable de vaincre le Fort (Mc 3,22-27), étant lui-même le Plus Fort. (Mc 1-7)
Maintenant, se présente sa famille charnelle, qui n’a pas foi en lui.
Le texte :
Et vient sa mère et ses frères… – Ils constituent sa famille de chair. Essayons de nous la représenter.
Sa mère est Marie, celle qui a été confiée à Joseph il y a une trentaine d’années. Ce Joseph, ‘l’époux de Marie’, a veillé sur elle et sur l’Enfant dont il fut le père terrestre ; le secret divin lui avait été révélé. Au moment où nous en sommes de l’Évangile, Joseph est mort. Les ‘frères’ désignés ici, sont les fils que Joseph a eus d’un premier mariage, car il était veuf lorsque le Temple lui a confié Marie.9 Il faut se rappeler que la société juive de ce temps est de type patriarcal, et que le père de famille exerce un pouvoir absolu sur sa maisonnée ; quand il n’est plus là, son fils aîné le remplace. ‘Sa mère’, celle de Jésus, se trouve donc assujettie à Jacques le fils aîné de Joseph. Celui-ci, comme ses frères, gens de bonne volonté, pieux et traditionnalistes, grands observateurs de la Loi, sont dérangés et inquiets ; ils se sentent mis en danger par la nouvelle conduite du ‘petit dernier’, ce Jésus qui se montre maintenant grand thaumaturge assailli par les foules, créant du désordre, provocateur des institutions juives, mettant en question l’autorité des hauts personnages que sont les scribes par exemple, ainsi que le respect absolu dû au Sabbat. Ils pensent qu’il a perdu la raison10 ; et veulent le ramener à la maison, qu’on ne parle plus de lui, et que la vie ordinaire reprenne son cours ! Ils n’ont pas foi en lui, l’Évangéliste Jean le dit11 –, et par le fait se montrent ennemis de Jésus. Ils constituent le premier cercle d’opposants, celui des ‘gens de sa maison’.12
Se tenant dehors, ils ont envoyé quelqu’un vers lui pour l’appeler… – Ils n’entrent pas – sans doute ne veulent-ils pas se compromettre avec l’entourage ‘douteux’ de Jésus – et préfèrent-ils le faire appeler.
… et autour de lui, une foule était assise, et ils lui disent : Voici ta mère et tes frères dehors …Leur position assise les fait apparaître comme disciples, à l’écoute du Maître qu’ils entourent. Se tenir assis autour, ou se tenir dehors : la localisation des uns ou des autres souligne leur différence quant à leur opinion vis-à-vis de Jésus, et à leur attente.
… ils te cherchent– J’ai remarqué en consultant la Concordance en grec13 que les occurrences de ‘chercher’ dans le Pentateuque correspondent à des situations d’urgence et de menace, de danger, ou d’émotion extrême :
Les habitants de Sodome ‘cherchent’ la porte, par où se sauver (Gn 19,11) ; Joseph ‘cherche’ ses frères, qui en veulent à sa vie (Gn 37,15.16) ; Joseph ‘cherche’ à pleurer lorsqu’il revoit son frère (Gn 43,30) ; Pharaon ‘cherche’ à faire périr … (Ex 2,15), etc. Ou alors il s’agit de ‘chercher’ Dieu de façon pressante et sincère, comme un havre de salut (Dt 4,29).
Ici aussi, ils te cherchent est pressant, menaçant ; et on sent la pression qui s’abat sur Jésus autant que l’opprobre qui dès maintenant pèse sur ses disciples.
La persévérance dans l’épreuve, nécessaire lorsque vient la persécution, et que Jésus leur enseignera clairement avant son entrée à Jérusalem pour la Passion-Crucifixion14, s’avère donc expérimentable dès maintenant, et ne les quittera plus.
Et répondant, il leur dit : qui est ma mère et mes frères …
Par cette question il signale son désaccord, sa désapprobation vis-à-vis des gens de sa maison. Même sa mère est incluse dans ce groupe.
Et regardant à la ronde ceux qui sont assis en cercle autour de lui il dit : Voici ma mère et mes frères.
Quand Dieu voit, il apprécie et confère une qualité. Comme déjà en Gn 1,4 : Et Dieu a vu la lumière : cela est beau. Donc déjà, il fait d’eux des mères et des frères –, si toutefois ils remplissent les conditions, on va voir comment. Car Dieu est premier. C’est lui qui mène la relation. Il appelle chacun et lui assigne sa vocation.
Quiconque fait le vouloir de Dieu …
Qu’est-ce que faire le vouloir de Dieu ? C’est ‘le craindre’, au sens de se soumettre volontairement, et avec amour, à la volonté divine ; exactement le contraire de la révolte.
Le Christ lui-même est le premier à faire le vouloir de Dieu, incessamment à l’écoute de sa volonté dans sa prière. Agissant toujours selon cette volonté, Jésus nous montre le Père ; il nous le révèle.15
Et pour nous, quel sera le vouloir de Dieu ? J’ai glané quelques exemples :
-Soyez en paix entre vous.(1Thess 5,13) Et plus loin (5, 16) – Restez toujours joyeux. 17. Priez sans cesse. 18. En toute condition soyez dans l’action de grâces. C’est la volonté de Dieu sur vous dans le Christ Jésus ... Se réjouir et rendre grâces …
-En Jacques le conseil est différent, mais complémentaire : Ja 4, 6b – Le Seigneur résiste aux orgueilleux, tandis qu’aux humbles il donne sa faveur. 7.Soumettez-vous donc à Dieu (…) 8. Nettoyez vos mains, pécheurs ; purifiez vos cœurs, hommes partagés ! (…). Rejetez toute souillure, et recevez humblement la Parole semée en vous : elle est capable de porter vos âmes au salut. (Petit clin d’œil à propos du fruit de la Parole mémorisée … On va en reparler plus loin.)
- Et aussi : Remets-nous nos dettes comme nous remettons à nos débiteurs … Indication s’il en est de la volonté de Dieu sur nous …
- Sans oublier Matthieu 25, 31-46 – Le jugement dernier, et en particulier le verset 46 : Chaque fois que vous l’avez fait à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous l’avez fait. En se souciant de ceux qui sont dans le besoin, l’homme fait le vouloir de Dieu.
… celui-là est mon frère et ma sœur …
Au passage, notons que le Christ cite à pied d’égalité les hommes et les femmes, alors que dans la société juive, ils étaient très inégaux socialement. Devant Dieu, ils sont à égalité, chacun chargé de la même responsabilité en ce qui concerne le Salut.
Sont frères et sœurs dans le monde ancien, ceux qui mangent à la même table, partageant même pain et même enseignement dispensés par le père de famille.
C’est bien ce que nous faisons, nous les chrétiens en partageant chaque dimanche le banquet eucharistique offert par le Père. Mais nous sommes baptisés, et avons donc été réengendrés d’eau et d’Esprit ... Charge à chacun de nous d’actualiser son baptême.
À ses frères charnels, le Christ n’ouvre pas la porte. Qu’attend-il donc de ‘frères’ ?
En fait, il y a pour ceux qui ont foi une adoption, un don de l’Esprit … qui fait de vous des fils adoptifs, et par lequel nous crions : Abba, Père. (Ro 8,15) ; car vous êtes tous fils de Dieu par la foi en Jésus Christ (Ga 3,26) ; Dieu avait décidé par avance qu’il ferait de nous ses enfants par Jésus Christ ; dans sa bienveillance, voilà ce qu’il a voulu (ou mieux : selon le bon plaisir de sa volonté) (Ep 1,5).16
C’est cette adoption par l’Esprit qui fait de nous des frères de Jésus, adoption qui réalise le ‘bon plaisir de la volonté’ du Père, et au service de quoi se déploie la mission du Christ.17
Écoutons Saint Paul : 26. (…) L’Esprit Saint aussi nous vient en aide, parce que nous sommes faibles (…)27 (…) l’Esprit prie en faveur des croyants, comme Dieu le désire. 28. Nous savons que toutes choses contribuent au bien de ceux qui aiment Dieu (…) 29. Car Dieu les a choisis d’avance ; il a aussi décidé d’avance de les rendre semblables à son fils, afin que celui-ci soit l’aîné d’un grand nombre de frères. (Ro 8, 26-29).
Ceux que Dieu a choisiset qui seront frères du Christ, sont ceux qui acceptent de naître de nouveau. Cette expérience est indispensable pour entrer dans le Royaume. Et elle est proposée à tout être humain : il est venu appeler tous. Dieu nous veut tous.
Chacun peut naître de nouveau, par la parole de Dieu et par l’Esprit, s’il croit en Jésus Christ. C’est la seule condition.
Écoutons ce qu’enseignent les apôtres, et Jacques son frère, une fois converti :
- Jean 1,12-13 – Prologue – À tous ceux qui l’ont accueilli, il leur a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu, à ceux-là qui croient en son nom, à ceux-là qui ni du sang, ni de la volonté de la chair, ni de la volonté de l’homme, mais de Dieu même sont nés (ouont été engendrés).
- Jean 3,3 – Entretien avec Nicodème– Amen, amen, je dis à toi. Personne ne peut voir le Royaume de Dieu s’il ne naît pas de nouveau (ou, s’il n’est pas engendré d’en haut.) (…) Ainsi quiconque a été engendré par le Souffle.
- 1 Pierre 1, 23 – (Vous avez été) engendrés de nouveau, par une semence non pas corruptible (comprenons : comme l’est la semence humaine), mais incorruptible : par la Parole vivante de Dieu, qui demeure.
- Jacques 4, 8 (déjà cité) – Recevez humblementla Parole semée en vous : elle est capable de porter vos âmes au salut.
Voilà donc les frères qu’il veut : non pas charnels, mais croyants et ‘réengendrés d’en haut’ par le Souffle et par la Parole. Pour eux, il donnera sa vie et ouvrira le Royaume.
… et ma mère.
La mère est respectée dans la culture juive, et elle a droit à la piété filiale, pourtant Jésus n’admire en sa mère que celle qui a écouté la parole de Dieu.18 En Luc 11, 27s. quand une femme s’écrie : Heureuses les entrailles qui t’ont porté et les seins que tu as sucés, Jésus répond : Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu, et la gardent.
Une note de la TOB 2011 explique : ce disant, Jésus ne méprise pas sa mère, au contraire : elle a été présentée comme LA croyante, et cette foi qui fait toute sa grandeur est la pierre qui fonde l’accomplissement du Salut. En effet, en Luc 1, 45 au moment de la Visitation, par la bouche d’Élisabeth il est dit : Bienheureuse celle qui a cru : ce qui lui a été dit de la part du Seigneur s’accomplira. Et à la lumière de ce que nous avons découvert jusqu’à maintenant, on peut comprendre que, parce qu’elle a cru à ce qui lui a été dit, ce qui lui a été dit pourra s’accomplir, à savoir : Tu lui donneras le nom de Jésus (= Dieu sauve) … On l’appellera fils du Très Haut … et son règne n’aura point de fin.
C’est la foi de la mère qui rend la chose réalisable. Par la foi, elle se rend disponible à la volonté de Dieu qui, lui, va disposer les évènements en faveur du Salut, conformément à son ‘bon plaisir’, ou désir ardent. Sans la foi de Marie, tout s’arrêtait.
Est ‘mère’ celui, ou celle, qui par sa foi, et par le don de soi-même – comme Marie – permet que le projet de Dieu s’accomplisse – et cela passe par l’incarnation du Verbe, c’est charnel.
En conclusion, il semble que
- être frère du Christ, c’est être rené d’eau et d’Esprit, et/ou par la Parole, et ainsi recevoir l’adoption ; et
- être mère du Christ, c’est croire à la Parole, et se mettre à son service avec son corps, son âme et son esprit, en être rempli, et engendrer d’autres à la foi comme Saint Paul l’écrit à son disciple : (…) À Timothée que j’ai réellement enfanté dans la foi.
Et à Dieu soit la gloire dans les siècles des siècles.
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