Publication de la Métropole Orthodoxe Roumaine d'Europe Occidentale et Méridionale
Revue de spiritualité et d'information orthodoxe
Les médecins chrétiens qui ont lu attentivement les Évangiles de la Passion et examiné scientifiquement le Linceul, le Suaire et la Tunique du Christ, disent tous que Jésus a souffert d’une manière effroyable : les douleurs brûlantes de la flagellation, la torture des clous, les crampes violentes allant jusqu’à la tétanie, la déshydratation et l’augmentation de Sa température, la perte importante de Son sang, alors qu’Il était entièrement à jeun depuis la veille au soir et n’avait pas dormi de la nuit, auxquels il faut ajouter Ses souffrances morales (la fuite de Ses disciples, les insultes, la haine exprimée par le sanhédrin et le peuple) ont fait de Lui le plus souffrant de tous les hommes, « l’Homme de douleur» annoncé par les prophètes (Is 53/3). Devant la dureté du cœur des hommes, c’est le cosmos qui crie : les trois Synoptiques mentionnent l’éclipse de soleil « sur le pays entier, à partir de la 6è heure et jusqu’à la 9è heure », comme l’avait annoncé le prophète Amos45. Le soleil – symbole cosmique du Christ – se cache parce que le « Soleil de justice » (Mal 4/2) qui rayonne de la Lumière du Père, est en train de mourir, Lumière incréée qui est mise sous le boisseau. En fait l’éclipse, qui a dû commencer vers midi, est devenue totale au moment de la mort du Christ.
On est très proche du dénouement. Le Christ n’en peut plus, l’air Lui manque, Ses forces diminuent. Vers la 9è heure (15h), Il pousse un cri et dit en araméen : « Mon Dieu, Mon Dieu, pourquoi M’as‑Tu abandonné ? »46. Cette phrase tragique du Christ est non seulement d’une extraordinaire intensité dramatique, mais encore une révélation théologique, car elle témoigne explicitement des deux natures du Christ : comme le dit souvent Saint Ephrem le Syrien : comme Dieu Il savait et comme homme, Il ne savait pas. Ici, Sa divinité s’est effacée devant Son humanité, sinon Il n’aurait pas pu souffrir, ni mourir47. Ces paroles témoignent aussi du sacrifice accompli par le Père Lui‑même, qui accepte d’abandonner Son « Fils bien‑aimé », de Le sacrifier pour le salut du monde et de l’Homme. Nous pouvons ajouter qu’elles témoignent aussi du sacrifice de l’Esprit Saint, car, s’Il ne S’était pas retiré de la nature humaine du Fils, jamais le Christ n’aurait pu mourir, donner Sa vie. Le Père et l’Esprit souffrent dans le Fils. Les trois personnes divines coopèrent pour sauver l’Homme image de Dieu, chacune selon Son caractère hypostatique. Le fait que Jésus ait crié cette phrase en araméen48, et non en hébreu, révèle qu’Il voulait être entendu par tous, témoignant de Son obéissance à Dieu et mettant le Sanhédrin et tout le peuple face à leur responsabilité dans ce « déicide ».
Saint Jean complète Saint Matthieu et Saint Marc en rapportant que Jésus a dit : « J’ai soif ». Au‑delà de la soif physique, terrible, le Christ avait soif du salut des hommes. Un soldat accoure, remplit « une éponge de vinaigre49 », la fixe à un roseau pour Lui donner à boire. Et, contrairement à ce qui s’était passé juste avant Sa crucifixion, Il en a bu (Jn 19/29‑30), parce qu’Il était libre de le faire et qu’Il voulait « accomplir l’Écriture »50 (c’est‑à‑dire obéir à Son Père, et à l’Esprit qui est l’inspirateur des prophéties). D’ailleurs, il dira aussitôt : « C’est accompli » (Jn 19/30). J’ai bu le calice jusqu’à la lie, J’ai accompli Ma mission51. Puis Il poussa un grand cri en disant : « Père, Je remets Mon esprit entre Tes mains »52 (Lc 23/46 le Seigneur parle ici en tant qu’homme). « Et il rendit l’Esprit53 » (Jn 19/30). Il rend à Dieu‑Père Son souffle de vie humain. Le Fils de Dieu, Jésus‑Christ, « le seul sans péché », expérimente la mort, qui est une conséquence du péché : Il a pris sur Lui le poids de nos fautes, qui ont conduit à notre mort. Celui qui est la Vie meurt pour nous. C’est aussi un enseignement pour nous : Il nous révèle ce qu’est la mort physique, la « première mort » : remettre notre esprit entre les mains de notre Père céleste.
Arrêtons‑nous un instant sur la mort physique du Christ. Nous connaissons bien la structure corporelle et la physiologie de la nature humaine du Christ, grâce à Son linceul mortuaire (de Turin) et à Sa Tunique (d’Argenteuil) et à toutes les études scientifiques faites sur Son Sang, Ses cheveux et poils de barbe et les parcelles de Sa peau. Le Christ était grand et fort, et l’Évangile nous révèle Sa force intérieure et morale.
Les médecins et chirurgiens54, qui ont étudié Sa Passion et Sa mort, en se basant sur l’examen de Ses reliques et les résultats de leur étude scientifique, considèrent qu’Il a résisté à la souffrance jusqu’au bout, sans tomber en syncope, et qu’Il est mort, en pleine conscience, lorsqu’Il l’a voulu, ce que disaient déjà Saint Hilaire de Poitiers55 et Saint Jean Chrysostome au 4è siècle56. En fait, Jésus s’est comporté comme un athlète, un héros – au sens humain du terme – ce qui correspond à ce qu’Il était – Homme parfait – et à ce qu’Il avait enseigné. On ne Lui pas pris Sa vie, mais Il l’a donnée, comme Il l’avait dit57, et comme l’avait prophétisé Isaïe huit siècles auparavant58. Ici, la science confirme la foi59 ! Le Christ est né, en tant qu’Homme, pur et immaculé, comme Adam et Ève. Mais nous voyons dans l’Évangile qu’Il a, en tant qu’homme, une vie spirituelle intense et profonde, priant sans cesse, appliquant en esprit la Loi qu’Il avait Lui‑même donnée à Moïse par le Saint‑Esprit, et amenant progressivement la nature humaine à sa perfection60 – selon le dessein initial du Père – avec Sa volonté humaine – liée à Sa nature humaine – et sanctifiée par le Saint‑Esprit, car c’est le caractère hypostatique d’Esprit que de communiquer à l’homme la grâce divine. Le Christ n’a pas triché : pendant ce très long effort spirituel, qui fut essentiel pendant Ses 30 longues années de préparation humaine à Sa mission divine, Sa nature divine s’est effacée librement devant Sa nature humaine (comme l’exprime très bien Saint Ephrem le Syrien, au 4è siècle).
Revenons maintenant au drame universel que constitue la mort humaine du Christ en l’an 30 [théoriquement 33], qui bouleverse toute la création.
Aussitôt, le voile du Temple – le « second voile », qui cachait le Saint des Saints – se déchire du haut jusqu’en bas61. Tout est dévoilé et mis à nu : le mystère divin est révélé, les secrets des cœurs sont révélés. C’est une anticipation et une prophétie du jugement dernier, où tout sera dévoilé. Ce temple qui n’a pas reçu Jésus comme Messie est devenu inutile et sera détruit 40 ans plus tard62, conformément à la prophétie du Christ (Mt 24, Mc 13, Lc 17). Dans l’Église, qui va lui succéder, les mystères seront révélés à tous les initiés, les baptisés : le dessein de Dieu s’accomplira.
Et tout le cosmos crie et hurle de voir Son créateur tué par l’Homme. Il y a un tremblement de terre redoutable – « les rochers se fendent » –63, une tempête terrible, avec grondement de tonnerre et éclairs, qui s’ajoutent à l’éclipse totale du soleil. C’est la « fin du monde », un cataclysme qui annonce et préfigure celui qui précédera le Retour du Christ en gloire. La foule est saisie de peur, panique et s’enfuit. Des tombeaux s’ouvrent64, et déjà des saints ressuscitent, préfigure de la Résurrection du Christ et de la résurrection universelle. Tout redevient possible. Mais Saint Matthieu précise bien qu’ils n’entreront dans Jérusalem qu’après la Résurrection du Christ, pour bien signifier qu’ils n’en sont que les prémices et des fruits de la résurrection du Fils de l’Homme.
Le centurion et les soldats sont très impressionnés et ont peur. Le centurion Longin, qui avait déjà manifesté de l’humanité à Jésus, s’exclame : « Vraiment, cet homme était le Fils de Dieu » (chez Saint Luc : « un Juste »). Ce centurion sera canonisé par l’Église, qui reconnaîtra en lui un juste65. Tout le monde s’enfuit, les gens sont remplis de frayeur.
Satan a apparemment et momentanément gagné, car le rabbi Jésus de Nazareth, qui l‘inquiétait beaucoup, a été tué, mais c’est parce que Dieu‑Père l’a bien voulu. Sa pseudo‑victoire sera de courte durée, car le Christ va le tromper : par Sa très sainte mort, il va pouvoir descendre « naturellement » dans l’Enfer, en briser les portes et libérer nos premiers parents, Adam et Ève. La mort du Christ sur la croix est déjà Sa victoire66 (cf. ce qu’Il a dit au Bon larron).
Le Sanhédrin ne se laisse pas impressionner par ce cataclysme : sa haine du Christ est intacte67. Dieu respecte toujours notre liberté : c’est pour cette raison qu’il existe un enfer éternel (Dieu n’enfreint pas notre liberté, même après notre mort). La seule chose qui leur importe est que les corps ne restent pas sur les croix, parce que la mort était considérée comme une impureté rituelle et qu’on était la veille du sabbat ! Ils viennent de tuer le seul Homme juste et ils se préoccupent du rituel religieux ! Le formalisme clérical est ridicule et une erreur spirituelle. Mais, pour retirer les corps, il fallait s’assurer que les condamnés fussent morts. Les soldats viennent donc briser les jambes des deux larrons68, comme c’était l’usage, parce qu’ils n’étaient pas morts69. Puis ils constatent que Jésus est déjà mort. Le centurion Lui donne alors un coup de lance « professionnel » sur le côté droit du thorax, pour percer son cœur70, d’où le sang jaillit avec un liquide qui ressemblait à de l’eau64. Saint Jean, qui en est le seul témoin en est très étonné et éprouve le besoin de dire que c’est « véridique » (Jn 19/35).
L’Écriture est accomplie : « Pas un de Ses os ne sera brisé » (Ps. 33 [He 34]/21 et Ex 12/46), et « Ils verront Celui qu’ils ont transpercé » (Za 12/10). Les Pères de l’Église71 et toute la tradition ont vu dans le jaillissement du sang et de l’eau du Cœur du Christ le symbole de la naissance de l’Église. C’est aussi un symbole des deux natures du Christ72 et de l’Eucharistie72. Ce sacrifice rachète le péché de Caïn qui avait commis le premier meurtre en tuant son frère, le juste Abel, et dont le sang avait coulé sur la terre. Dieu avait alors dit à Caïn : « La voix du sang de ton frère crie de la terre jusqu’à Moi » (Ge 4/10). Jésus a réparé le mal que nous avions fait. Son précieux sang coule sur la terre, mais pour la purifier et la sanctifier.
C’est de ce cœur aimant, transpercé par nos péchés, que jaillit notre guérison, notre salut et notre déification.
P. Noël TANAZACQ, Paris
Notes :
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