Ajouté le: 17 Janvier 2020 L'heure: 15:14

L’Église dans le Nouveau Testament (1)

« Vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis, pour proclamer les louanges de Celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière… » (I Pi. II, 9).

L’Église n’est pas une institution, un service parmi d’autres qu’offre la société des hommes de ce monde déchu, mais prophétie du Royaume qui vient. Elle est vie nouvelle en Christ,Corps du Christfamille de Dieu et nous allons voir comment les livres du Nouveau Testament et particulièrement les épîtres de l’Apôtre des Nations, rendent compte de cette réalité divino-humaine qu’est l’Église.

Fondée par le Christ Seigneur, par la descente du Saint Esprit au jour de la Pentecôte, Esprit qui descend sur les Apôtres assemblés et personnellement sur chacun d’entre eux « Le jour de la Pentecôte étant arrivé, ils se trouvaient tous ensemble dans un même lieu, quand, tout à coup, vint du ciel un bruit tel que celui d’un violent coup de vent, qui remplit toute la maison où ils se tenaient. Ils virent apparaître des langues qu’on eût dites de feu ; elles se partageaient, et il s’en posa une sur chacun d’eux. Tous furent alors remplis de l’Esprit Saint… » (Ac. II, 1-4a).

Adviennent alors, suite au discours de l’Apôtre Pierre devant la très nombreuse foule des Juifs et des prosélytes présents à Jérusalem, puisque c’était Chavouôt, cinquante jours après Pessah, les premières conversions de Juifs, « Eux donc, accueillant sa parole se firent baptiser. Il s’adjoignit ce jour-là environ trois mille âmes » (Ac. II, 41). Et les premiers païens, à leur tour entrent dans l’Église en recevant le saint baptême à la suite du discours de l’Apôtre Pierre chez Corneille, centurion de la cohorte Italique (Ac. X, 44-48).

Le Livre des Actes des Apôtres nous décrit en peu de mots, l’union des fidèles de la première Église de Jérusalem : « Ils se montraient assidus à l’enseignement des Apôtres, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain, et aux prières » (Ac. II, 42). L’appartenance à l’Église par le saint baptême, signifie l’union de tous sur le fondement de la doctrine reçue des Apôtres -le dépôt sacré de la foi-, la prière liturgique, qu’elle soit celle de l’Église assemblée ou la prière personnelle, la prière chrétienne est toujours un acte liturgique, la communion au Corps et au Sang du Christ, nourriture d’immortalité, toujours mangée, jamais épuisée et l’amour fraternel parmi les membres du peuple des rachetés par le Sang précieux du Christ.

Nous la voyons également cette première Église, assemblée à Jérusalem, car la synodalité est l’une de ses caractéristiques fondamentales, pour statuer, suite à la controverse d’Antioche sur la question des observances mosaïques, après l’entrée des païens et l’opposition de certains « judéo-chrétiens » (1). La décision adressée aux fidèles sous la forme d’une lettre apostolique est présentée comme inspirée par l’Esprit Saint : « L’Esprit Saint et nous-mêmes avons décidé… » (Ac. XV, 28a).

Au-delà des Actes des Apôtres, le Nouveau Testament est riche en expressions qui désignent l’Église. Venons-en aux principales d’entre elles. La première épître aux Corinthiens en III, 9 parle de l’Église comme d’un édifice, d’une demeure, d’un champ « Car nous sommes les coopérateurs de Dieu ; vous êtes le champ de Dieu, l’édifice όικοδομή de Dieu » et en III, 16 ναὸϛ θεοῡ temple de Dieu. Saint Paul aux Éphésiens ajoute : « Car la construction que vous êtes a pour fondation les apôtres et prophètes, et pour pierre d’angle le Christ Jésus lui-même. En lui toute construction s’ajuste et grandit en un temple saint dans le Seigneur ; en lui, vous aussi, vous êtes intégrés à la construction, pour devenir une demeure de Dieu, dans l’Esprit » (Eph. II, 20-22). Dans l’épître aux Hébreux, parlant des deux alliances et de la Jérusalem céleste, l’Apôtre dit : « Mais vous vous êtes approchés de la montagne de Sion et de la cité du Dieu vivant, de la Jérusalem céleste, et de myriades d’anges, réunion de fête, et de l’assemblée des premiers-nés ἐκκλησία πρωτοτοκωνqui sont inscrits dans les cieux… » (Hb. XII, 22-23a) et ces paroles s’adressent aux fidèles de l’Église de Jérusalem qui sont exhortés à tenir ferme dans la foi, et à ne pas retourner au judaïsme.

Dans la première épître de saint Pierre, dans les instructions qu’il donne aux croyants, l’Apôtre leur demande : « Approchez-vous de lui, pierre vivante, rejetée par les hommes, mais choisie, précieuse auprès de Dieu. Vous-mêmes, comme pierres vivantes, prêtez-vous à l’édification d’un édifice spirituel, pour un sacerdoce saint, en vue d’offrir des sacrifices spirituels, agréables à Dieu par Jésus Christ » (I Pi. II, 4-5). L’image d’un édifice spirituel composé de pierres vivantes assemblées est reprise dans le livre de l’Apocalypse, dans l’épître adressée à l’Église de Philadelphie où il est fait mention des épreuves qui vont fondre sur le monde entier, mais il y a en même temps une espérance pour celui qui tient ferme : « Mon retour est proche : tiens ferme ce que tu as, pour que nul ne ravisse ta couronne. Le vainqueur, je le ferai colonne στῡλον dans le temple de mon Dieu ; il n’en sortira plus jamais et je graverai sur lui le nom de mon Dieu et le nom de la Cité de mon Dieu… » (Ap. III, 11-12a).

En Ap. XXI, 3, il y a une référence à l’habitation de Dieu parmi les hommes, littéralement la σκηνὴ, qui nous renvoie à la Tente d’assignation, lieu de la présence divine qui accompagnait les Hébreux au désert. Ce même terme nous le retrouvons dans le Prologue de l’Évangile de saint Jean : « Il a planté sa tente parmi nous » (Jn. I, 14b).

C’est incontestablement chez saint Paul qu’il y a la plus grande pluralité d’images pour rendre compte de cette mystérieuse réalité divino-humaine qu’est l’Église. Énonçons-en les principales. Dans l’épître aux Romains, l’Apôtre utilise une comparaison significative : de même qu’une femme peut épouser un autre homme, lorsque son mari décède, – dans le cas contraire elle serait adultère selon la Loi –, ainsi les fidèles du Christ ont « été mis à mort à l’égard de la Loi par le corps du Christ pour appartenir à un autre, à Celui qui est ressuscité d’entre les morts, afin que nous fructifiions pour Dieu » (Rm. VII, 4). C’est l’image si importante de l’Église, épouse du Christ, épouse de l’Agneau, thème que nous connaissons bien, puisque le mystère du mariage d’un homme et d’une femme qui appartient à l’ordre de la Création, est élevé dans la nouvelle alliance à la dignité sacramentelle trouvant la plénitude de son sens dans l’union du Christ et de l’Église. C’est pourquoi il est dit : « Je vous ai fiancés à un unique époux pour vous présenter au Christ comme une vierge pure ».

Nous retrouvons dans l’épître aux Éphésiens, ce thème des épousailles pour caractériser la relation entre le Christ et son Église, au chapitre V, versets bien connus puisqu’ils font partie des lectures du mariage. Citons ici les versets 25 à 28 : « Maris, aimez vos femmescomme le Christ a aimé l’Église : il s’est livré pour elle, afin de la sanctifier en la purifiant par le bain d’eau qu’une parole accompagne ; car il voulait se la présenter à lui-même toute resplendissante, sans tache ni ride, ni rien de tel, mais sainte et immaculée ». À dire vrai, ce thème des épousailles n’est pas proprement néo-testamentaire. Il est déjà largement présent dans l’Ancien Testament, en particulier chez les Prophètes d’Israël, et c’est la raison pour laquelle toute infidélité à l’Alliance entre Dieu et son peuple est qualifiée de prostitution. L’Apocalypse, dans les chants de triomphe au ciel évoque les noces de l’Agneau : « Soyons dans l’allégresse et dans la joie, rendons gloire à Dieu, car voici les noces de l’Agneau, et son épouse s’est fait belle ; on lui a donné de se vêtir de lin d’une blancheur éclatante, le lin c’est en effet les bonnes actions des saints » (Ap. XIX, 7a).

D’autres images scripturaires ont une grande importance : l’Église maison de Dieu, famille de Dieu, l’Église troupeau dont le berger est le Christ, l’Église vigne du Seigneur dont les sarments sont unis au cep, l’Église peuple de Dieu, l’Église Corps du Christ. Dans la première épître à Timothée, son fils très aimé, saint Paul qualifie l’Église de « maison de Dieu » et dit : « il faut que tu saches comment te comporter dans la maison de Dieu όίκῳ θεοῡ, je veux dire l’Église du Dieu έκκλησία θεου vivant : colonne et fondement de la vérité » (I Tim. III, 15). En Hébreux III, à propos de la supériorité du Christ sur Moïse, il est dit que ce dernier « a été fidèle dans toute sa maison [celle de Dieu] en qualité de serviteur, pour témoigner de ce qui devait être dit ; tandis que le Christ, lui, l’a été en qualité de fils [de Dieu], à la tête de la maison » (vv.5 et 6a). Le verset 6b ajoute : « Et sa maison c’est nous, pourvu que nous gardions l’assurance et la joyeuse fierté de l’espérance » (v.6b). D’autant que cette maison a, à sa tête, le Christ grand prêtre selon l’ordre de Melchisedeck.

L’Église troupeau dont le Seigneur Jésus Christ est le berger, l’unique et bon pasteur, celui dont les brebis c’est-à-dire les fidèles de l’Église, connaissent la voix, lui qui « les appelle une à une » (Jn. X, 3b). Les brebis du Christ sont appelées chacune par leur nom et « Elles ne suivront pas un étranger : elles le fuiront au contraire, parce qu’elles ne connaissent pas la voix des étrangers » (Jn. X, 5). Le Seigneur ajoute : « Je suis le bon pasteur ; le bon pasteur donne sa vie pour ses brebis » (Jn. X, 11). D’où l’avertissement adressé à ceux qui, à la suite des saints Apôtres ont la garde et la charge de conduire le troupeau à eux confié dans la succession des générations de fidèles, que nous trouvons au livre des Actes des Apôtres : « Soyez attentifs à vous-mêmes, et à tout le troupeau dont l’Esprit Saint vous a établis gardiens έπισκόπους – surveillants – pour paître l’Église de Dieu qu’il s’est acquise par le sang de son propre Fils » (Ac. XX, 28).

L’Église vigne du Seigneur. Ce thème de la vigne du Seigneur est vétéro-testamentaire. Israël est appelé la vigne du Seigneur sabaoth et dans l’évangile de saint Jean, le Christ dit de lui-même : « Je suis la vigne ; vous les sarments. Celui qui demeure en moi, et moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruit, car hors de moi vous ne pouvez rien faire. Si quelqu’un ne demeure pas en moi, il est jeté dehors comme le sarment et il dessèche ; on les ramasse et on les jette au feu et ils brûlent » (Jn. XV, 5-6). Le fruit de la vigne c’est le vin, qui non seulement réjouit le cœur de l’homme comme le dit le Psalmiste, mais qui est surtout le breuvage du Royaume.

L’Église peuple de Dieu. Autre thème vétéro-testamentaire repris par saint Paul, mais aussi par saint Pierre, dans la continuité avec l’Ancien Testament. Exhortant ceux qui croient au Christ et en sa Parole, l’Apôtre leur dit : « Vous êtes une race élue, un sacerdoce royal, une nation sainte, un peuple acquis, pour proclamer les louanges de Celui qui vous a appelés des ténèbres à son admirable lumière, vous qui jadis n’étiez pas un peuple et qui êtes maintenant le Peuple de Dieu, qui n’obteniez pas miséricorde et qui maintenant avez obtenu miséricorde » (IPi. II, 9-10).

Saint Paul quant à lui, déclare dans l’épître aux Romains : « dans le dessein de manifester la richesse de sa gloire envers des vases de miséricorde qu’il a d’avance préparés pour la gloire, envers nous qu’il a appelés non seulement d’entre les juifs mais encore d’entre les païens. C’est bien ce qu’il a dit en Osée : J’appellerai mon peuple celui qui n’était pas mon peuple, et bien-aimée celle qui n’était pas la bien-aimée. Et au lieu même où on leur avait dit : Vous n’êtes pas mon peuple, on les appellera fils du Dieu vivant » (Rm. IX, 23-26).

L’Église Corps du Christ. Cette expression est à double entente. Dans la première épître aux Corinthiens, au douzième chapitre, l’Apôtre des nations donne un enseignement surles dons spirituels, les charismes dans l’assemblée des fidèles du Christ, l’Église, au moyen d’une comparaison empruntée à la diversité des membres du corps humain et leur unité. Les versets 12 et 13 mettent en parallèle l’unité des membres du corps et celle du Corps du Christ dans la diversité de ceux qui le composent et des différents charismes : « De même en effet, que le corps est un, tout en ayant plusieurs membres, et que tous les membres du corps, en dépit de leur pluralité, ne forment qu’un seul corps, ainsi en est-il du Christ. Aussi bien est-ce en un seul Esprit que nous tous avons été baptisés en un seul corps, Juifs ou Grecs, esclaves ou hommes libres, et nous avons été abreuvés d’un seul Esprit » (vv. 12 et 13).

L’expression « Corps du Christ » renvoie également à la manne céleste inépuisable, à la nourriture d’immortalité, au corps du Christ rompu pour nous : « Le pain que nous rompons n’est-il pas communion au corps du Christ ? Puisqu’il n’y a qu’un seul pain, à nous tous nous ne formons qu’un seul corps, car tous nous avons part à cet unique pain » (I Cor. X, 16-17). C’est le plus haut mystère donné par le Christ à son Église, clef de voûte de tous les autres.

Il nous restera à étudier plus avant le terme έκκλησία qui est employé pour la première fois dans la première épître de saint Paul aux Thessaloniciens et plus d’une soixantaine de fois dans l’ensemble de ses épîtres, sa signification en lien avec la terminologie vétéro-testamentaire de la Septante, les traits caractéristiques de l’ecclésia, et la dimension eschatologique de ce nom dans le Nouveau Testament.

P. Gérard Reynaud

Note :

« judéo-chrétiens » : l’emploi de ce vocable est strictement lié au contexte historique de l’Église primitive : il désigne les fidèles du Christ issus du judaïsme, comme on parle de « pagano-chrétiens » pour ceux qui dans l’Église venaient du paganisme. C’est le seul usage recevable de cette expression, tout autre n’étant qu’un abus de langage.

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