Ajouté le: 3 Juillet 2018 L'heure: 15:14

Apprendre par cœur l'Evangile (39)

La Guérison du Paralysé – Marc 2, 1-12

« … Dieu ne nous a pas appelés pour que nous demeurions dans l’impureté, mais il « nous a appelés à la sainteté. »(1 Thessaloniciens 4, 7)

Oui, Dieu veut nous communiquer sa sainteté, il veut nous déifier.

Sur ce verset, la note de la TOB 2011 explique : « Dans cette phrase, le verbe ‘appeler’ est « suivi de deux compléments : par l’un, Paul indique l’état dans lequel l’homme est appelé, « l’impureté, et par l’autre, ce à quoi l’homme est appelé : la sainteté. L’appel de Dieu est « donc essentiellement transformant. »

Oui, le Règne est une force de transformation.

Délivré du démon qui, tapi dans son cœur dirigeait sa conduite sans que le sujet lui-même en ait bien conscience1 ; délivré de la non-foi2 ; délivré de la lunette déformante qui le portait à médire de tout et de tous, et le rendait dégoûtant à voir3, l’homme se découvre maintenant paralysé !

Reprenons le scénario de la chute, déjà évoqué lors de l’épisode du Lépreux.

Ève avait vu le fruit défendu et il lui avait paru désirable, car elle avait chaussé la lunette déformante du serpent, et se trompait dans son estimation.4

Ayant guéri l’œil, le Christ-Médecin s’occupe maintenant du pied, organe de la marche. Car c’est par la démarche que nous nous approchons de l’objet de notre désir, soit en enfreignant la volonté de Dieu – comme dans le cas de la chute – soit en ‘marchant dans les voies du Seigneur’.

Dans le cas du Paralysé, Dieu a rendu inopérants ses pieds : au moins ils ne feront pas le mal !

Entrons dans le texte.

**Et étant entré de nouveau à Capharnaüm après quelques jours    on a entendu   il est à la maison    Et beaucoup se sont assemblés   au point qu’il n’y avait plus de places   même près de la porte   et il leur disait la parole

Sur le seuil de la porte, c’est là qu’on se prépare pour la rencontre de la Divine Trinité5 …

Qu’allons-nous donc découvrir, qu’allons nous apprendre avec ce texte ? Nous sommes toute ouïe !

**Et il en vient qui lui amènent un paralysé   qui est soulevé par les quatre,

et ne pouvant le porter auprès de lui   à cause de la foule   ils ont défait le toit6  là où il se trouvait   et ayant fait un trou   ils font descendre le grabat où le paralysé était couché.

L’homme est arrêté dans ses démarches, impuissant. Il dominait par sa langue, maintenant il prend conscience qu’il ne peut rien. Participant du monde déchu, il est spirituellement mort, et l’histoire met en scène un enterrement : raide et allongé, livré à quatre porteurs, l’homme est descendu comme dans la tombe. Et au fond du trou … il rencontre le Christ ! La Vie est là, tout en bas qui l’attend en quelque sorte !

L’homme n’aurait pas pu descendre seul dans son gouffre, mais les quatre l’ont porté. Ici, on peut supposer que ce sont les quatre disciples déjà appelés, Pierre et André, Jacques et Jean, mais d’une façon générale, il s’agit de l’Église. Ces quatre sont les prémices de l’Église, de la nouvelle communauté – de croyants – que le Christ fonde, par l’ ‘appel à la  sainteté’ susdit …

L’Église prend en charge et intercède, et met le ‘mort’ en présence du Vivant. Christ est le seul vivant dans ce monde déchu. Et la Vie est communiquée, elle triomphe. C’est une force de transformation qui opère à leur demande, parce qu’ils ont foi.

 **Et Yéshoua’  voyant leur foi   dit au paralysé    Enfant   tes péchés sont remis …

 – La foi est une adhésion : ils adhèrent à la personne du Christ. Par leur confiance, par leur  attente tout est rendu possible.

 – L’homme ici, pris en charge, épaulé par les croyants apprend de la bouche du Christ qu’il a péché (qu’il est donc responsable de son état), et qu’il est pardonné.

Quand un jour, il réalisera de quel don il est favorisé ainsi gratuitement, quelle ne sera pas sa reconnaissance, sa componction, son repentir : « Ah ! Mon Dieu, je t’ai fait tout cela, je t’ai ignoré, refusé, j’ai médit de toi, je me suis révolté, j’ai fait du mal aux autres, et tu m’accueilles … »  Il en pleurera … Repentir, don des larmes ...

 – Pourquoi ‘enfant’ ?

Qu’est-ce que l’enfant, sinon celui qui vient de naître, celui qui est encore proche du commencement de sa vie ? À ce mort en effet, Christ donne la Vie nouvelle, faisant de lui un nouveau-né, un enfant, qui aura à grandir avec le Christ pour modèle. Régénéré, il accepte d’être transformé en enfant de Dieu.

 **Or se trouvaient là quelques uns des scribes qui étaient assis   et qui ruminaient dans leur cœur   Pourquoi parle-t-il ainsi  celui-là   Il blasphème   Qui peut remettre les péchés  sinon Dieu seul

Çà commence à gronder ! Les gens en place murmurent.7 Ils pressentent le danger pour leur sécurité et leurs valeurs. C’est la première controverse. Il y en aura cinq d’ici la fin du chapitre 2. Ce que dit le Christ ici, est pour eux sincèrement irrecevable. C’est du blasphème. Ils ont raison : seul Dieu peut remettre les péchés.

Ce qui leur manquera, c’est de faire le pas pour adhérer à la personne du Christ. Nous qui venons 2 000 ans après, nous pouvons facilement juger de cela ... Sur le moment, cela n’avait rien d’évident ... Nous n’aurions sans doute pas fait mieux.

En réponse à leur contestation et pour les mettre sur la voie, le Christ va leur confier une bribe du secret messianique … mordront-ils à l’hameçon ?

 **Et aussitôt   Yéshoua’   percevant en son souffle qu’ils ruminent ainsi en eux-mêmes leur dit   Pourquoi ruminez-vous ceci en vous-mêmes   Quel est le plus facile  Dire au paralysé   Tes péchés sont remis   ou dire   Relève-toi   soulève ton grabat et marche

Je te délie de ton impuissance, désormais marche dans les voies du Seigneur.

 **Or pour que vous sachiez que le Fils de l’Homme a autorité de remettre les péchés sur la terre …

Pour la première fois, ici au chapitre 2, le Christ se désigne lui-même, et le nom qu’il se donne est : ‘Fils de l’Homme’. Qu’est-ce que cela peut bien signifier ?

a/ Selon la chronologie de la Bible, la formule apparaît d’abord dans Ézéchiel. Dieu lui parle en l’interpellant : Fils d’homme, debout ! Je vais te parler ou : Fils d’homme ! Ces ossements vivront-ils ? C’est une expression araméenne,8 exprimant la relation entre Dieu et un être choisi.

b/ Puis dans la chronologie, vient la fameuse vision de Daniel (Daniel 7, 9-27) et son célèbre verset 13, cité par Jésus lui-même à plusieurs reprises, dans chacun des Évangiles :

La vision nous présente d’abord un vieillard vénérable qu’on reconnaît être Dieu au fait qu’il siège sur le trône de feu orné de roues de feu dont s’écoule un fleuve de feu, tandis que des myriades (d’anges) le servent.9 Il siège pour un jugement. Des Bêtes montées de la Mer, c’est-à-dire appartenant au Royaume du Mal, malfaisantes et monstrueuses sont éliminées, mais pas complètement.

Puis : (Dn 7, 13) Voici qu’avec (ou sur) les nuées du ciel venait comme un Fils d’Homme.

La présence des nuées du ciel signifie qu’il appartient au Royaume divin.

À son tour, il se présente au Jugement de l’Ancien. À lui,il lui fut donné souveraineté, gloire et royauté (…) souveraineté éternelle et royauté qui ne sera jamais détruite (…) Les peuples de toutes nations et langues le servaient.

Il est donc le héros ; adoubé par la divinité, il devient souverain de tous les peuples.

Une note de la TOB 2011 fait remarquer que le Fils d’Homme ne va pas de Dieu vers les hommes, mais vient vers Dieu en vue d’une intronisation solennelle : Le nommé ‘Fils d’Homme’ est chef du ‘peuple des Saints du Très-Haut’ et les représente. Tous seront persécutés par les Bêtes, mais le Jugement retirera la souveraineté aux Bêtes qui seront anéanties et dépossédées, au profit des Saints du Très-Haut, qui eux hériteront de la Royauté avec le Fils d’Homme.10

c/ Et dans Marc, au chevet du Paralysé ?

 – Quand il se dit Fils de l’Homme, le Christ se relie très clairement à ce personnage prophétique et céleste de Daniel 7, 13, à ce Fils d’Homme qui a combattu dans la peau d’un homme et qui reçoit de Dieu le Royaume eschatologique.11

Après l’époque du Prophète Daniel, la tradition juive identifiera ce Fils d’Homme au Messie davidique.12

Donc, Jésus – Messie – Fils de l’Homme : voilà comment le Christ se présente aux scribes, qui devraient pouvoir comprendre, eux les gardiens de la Tradition juive et des saintes Écritures ...13

Le Christ est toujours très elliptique quant à sa personne, car il y a le secret : Le projet divin de l’Incarnation et du salut de l’homme est un secret dont le démon doit rester ignorant jusqu’à l’achèvement. On en a déjà parlé.

 – Dans Marc, la formule ‘Fils de l’Homme’ revient 14 fois, toujours dans la bouche du Christ quand il parle de lui-même.

. 8 fois, comme combattant humilié, assumant la faiblesse et la misère de la nature humaine, pour souffrir, pour être livré, moqué, molesté, battu, tué,  pour servir et pour donner sa vie : en un mot pour accomplir les Écritures concernant le Serviteur Souffrant.14

. 6 fois comme celui qui ayant assumé le combat reçoit au Ciel, dans son habit d’homme, la Gloire et la Royauté, comme celui qui est souverain :

En Marc 2, 10, le Fils de l’Homme a autorité de remettre les péchés ; en 2, 28 Le Fils de l’Homme est Seigneur du Shabbat, donc souverain. Puis on trouve : il viendra dans la gloire de son Père avec les saints messagers (8,38) ; Vous pourrez parler quand le Fils de l’Homme se sera relevé d’entre les morts (9, 9) ; on leverra venir dans les nuées avec grande puissance et gloire (11, 26) ; on le verra assis à la droite de la Puissance et venant avec les nuées du ciel (14, 62). Employant les mots mêmes de la prophétie, le Christ se donne clairement comme le ‘Fils d’Homme’ de Daniel.

Futur martyr victorieux, ce Jésus-Fils de l’Homme est déjà investi de l’autorité divine pour remettre les péchés sur la terre, et en se donnant ce nom, il affirme qu’il a déjà acquis le peuple des martyrs, dont il est le chef, et qui seront son corps mystique. Notre temps terrestre est aboli : le futur est déjà accompli. C’est très impressionnant. Telle est sa mission, et il ira au bout. Nous savons qu’à Gethsémani il y a eu un rude combat …

Voilà ce qu’il nous apprend de lui par cette formule ‘Fils de l’Homme’, ici en Marc 2, 10. Il assume le combat, il ne cède pas, et il est vainqueur et il conquiert ses sujets, les Saints du Très-Haut.

Nous ne regrettons pas de nous être tenus près de la porte !

**…. il dit au paralysé   je dis à toi   Relève-toi   soulève ton grabat   et pars dans ta maison.

Jésus maintenant lui donne sa mission, et la force pour l’accomplir

Relève-toic’est de l’ordre de la résurrection. Montre que maintenant tu n’es plus mort, mais que tu vis comme un enfant de Dieu nouveau-né.

Et à sa Parole, l’énoncé s’accomplit.

C’est le propre de la Parole de Dieu que d’être agissante. ‘Dabar’ en hébreu ;

… soulève ton grabat … cette couche, c’est notre nature humaine pesante et lourde. Lui reçoit l’ordre de ne plus s’y vautrer accablé, mais de la porter, avec la force qui lui est alors donnée pour le faire. Il n’est plus l’esclave mais le maître de sa chair, tant qu’il reste dans cette injonction ;

… et pars dans ta maison. La maison, c’est ‘la petite église’, l’église domestique où chaque maître de maison est ‘prêtre’, ayant pour mission d’assumer et de transmettre la loi divine, la foi qu’il a reçue. Le paralysé reçoit ici sa mission : témoigner du bienfait et de la puissance de Dieu devant ceux de sa maisonnée.

**Et il s’est relevé   et aussitôt   soulevant son grabat   il est sorti   en présence de tous …

Donc, il le fait : il accepte de devenir acteur dans ce projet de miséricorde et de salut ; il met sa volonté en accord avec le projet divin, et il s’empare de l’occasion de sortir, c’est-à-dire de naître.

La première occurrence de sortie dans l’Écriture, c’est celle du peuple hébreu quittant l’Égypte : alors, il naît comme peuple de Dieu, traversant l’eau de la mer, mené par la nuée-présence de l’Esprit-Saint, comme dans un Baptême qui le transforme et le régénère.

Sortir, c’est naître.

 **… de sorte que tous étaient hors d’eux-mêmes   et glorifiaient Dieu en disant   Nous n’avons jamais vu cela.

Les témoins sont extasiés au sens propre : hors d’eux-mêmes,  et ils rendent gloire à Dieu.

Il y a là beaucoup de joie chez ces témoins stupéfaits. Mais pas encore de foi.

Guérir, oui, on veut toujours ; mais changer de vie … affronter l’hostilité des gens en place, tout remettre en question, c’est une autre affaire. C’est impossible sans la foi.

CONCLUSION

À ce stade de la quatrième guérison, l’homme est pleinement réconcilié avec Dieu, et par le fait, il se trouve réconcilié avec lui-même, joyeux. Plus d’angoisse, de rumination, de révolte. Il a accepté sa nullité, accepté de ne pas être le plus fort.

Il s’abandonne et s’ouvre sans réserve à ce que Dieu veut pour lui : il devient  un être pardonné, qui marche avec la force de Dieu dans la voie que Dieu met devant lui, libre, et capable de témoigner dans le cercle restreint mais réel de sa maisonnée.

Avec force, et joie. Transformé.

Gloire à Dieu pour tous les paralysés qui ont accepté le pardon divin, et maintenant marchent !

Car le Fils de l’Homme étantvenu pour nousservir (Marc 10, 45), par son office, l’homme déchu est transformé en enfant de Dieu en route pour la sainteté.

Notes :


1. 1re guérison, celle de l’Homme en souffle impur à la Synagogue – Marc 1, 21-28 – Apostolia n° 98 de mai 2016.
2. 2e guérison, celle de la Belle-mère de Pierre, prise de fièvre – Marc 1, 30 – Apostolia n° 99 de juin 2016.
3. 3e guérison, du lépreux – Marc 40-45 – Apostolia numéros 121 et 123  d’avril et juin 2018.
4. Dans le grec, il y a ‘horaô’-voir : Ève voit le fruit et l’estime ; de même, le Christ dit au lépreux : Vois, autrement dit : Rends-toi compte. Voir-horaô, c’est percevoir avec le sens de la vue, et porter un jugement, donner un qualificatif. Dieu aussi quand il voit la lumière (Gn 1, 4) dit : c’est beau. Dans le regard de Dieu, la création apparaît comme belle.
5. ‘Près de la porte’ – voir Apostolia n° 100 de juillet 2016.
6. Étant donnée l’architecture villageoise de l’époque, ils ne cassent rien : ils déplacent les lattes et les branchages qui composaient le toit, et pourront facilement être remis en place.
7. Les scribes sont les lettrés, les gardiens de la Loi. Et ils savent l’enseigner ‘comme il faut’. Ils sont assis, car c’est la position de l’enseignant. Le Christ aussi enseigne assis. Cela nous est dit de multiples fois.
8. Selon une note de la Bible de Jérusalem pour Matthieu 8, 20+ - Le Fils de l’Homme n’a pas où reposer sa tête.
9. Ceci nous rappelle la vision d’Ézéchiel, au chapitre 1 de son livre.
10. On peut comprendre que le ‘peuple des Saints du Très-Haut’ sont aussi la multitude ‘des martyrs et des saints qui intercèdent pour nous’ comme le dit la Liturgie de la Toussaint Occidentale dans son chant d’entrée, les imitateurs du Christ, couronnés eux aussi : l’Église Sainte.
11. Exprimé ainsi dans les notes de la Bible de Jérusalem.
12. TOB 2011, note pour Dn 7, 1.
13Fils d’Homme ou Fils de l’Homme, il semble donc que ce soit tout à fait équivalent.
14. Marc 8, 31/ 9,12 / 9,31 / 10, 33 / 10, 45 / 14, 21 / 14, 21 / 14, 41.

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