Ajouté le: 12 Août 2011 L'heure: 15:14

Le Festival culturel et artistique de la Métropole

1‑5  juin 2011

Le Festival culturel et artistique de la Métropole

L’art et la foi

Apropos d’artistes et de croyants, un ami sémiologue qui n’était ni l’un ni l’autre, sachant que moi, au contraire, je sentais l’art et je cherchais Dieu, m’a dit un jour : « je n’ai jamais connu un vrai artiste n’ayant pas, au fond de lui‑même, la foi; ni un bon croyant n’exerçant sa foi, dans un certain sens, „en artiste” ; mais le premier est parfois retranché dans sa quête orgueilleuse, tandis que le deuxième peut se laisser tenter par la suffisance d’une raideur craintive ».

L’ambition de cette première édition du Festival d’art de la Métropole, intitulé « Pour l’amour de la beauté », qui s’est tenu du 1er au 5 juin dernier à Paris et aux environs, avec la bénédiction et sous l’impulsion de Son Eminence le Métropolite Joseph, était celle – il nous semble  – de libérer et de faire exprimer, d’une part, les talents personnels des membres de la communauté, et d’autre part d’ouvrir l’Eglise à une rencontre avec les forces vivantes qui expriment une quête spirituelle sur le terrain de l’art, dans ses aspirations les plus nobles, dans sa recherche mystique de la beauté, comme instrument du salut, union au Créateur par la création.

Animés par un souffle, une tension expressive, qui ont trouvé une correspondance sincère dans un public participatif et empathique, les artistes, invités à s’exprimer autour des thèmes du mariage et du baptême, ont généreusement offert leur vision, leur découvertes, leur travail intérieur, en transmettant une forte charge émotionnelle.

Les concerts de musique classique des deux premières soirées dans la Salle Byzantine de l’Ambassade de Roumanie à Paris ont donné le ton à une manifestation de haut niveau artistique et d’un intérêt culturel sûr : la sympathie et le brio du concert d’ouverture de Claude Delangle, Alexandre Souillart, Odile Catelin‑Delangle ; la grâce de la pianiste Charlotte Coulaud ; l’élégance et la maîtrise du duo Diana Cazaban et Johan Farjot.

Emouvant et bouleversant par son caractère presque intime et familial, mais d’une intensité et rigueur touchantes, nous a paru le récital du célèbre pianiste, le Père Jean‑Claude Pennetier, lauréat des plus prestigieux concours du monde, ayant accepté de réjouir la communauté qu’il sert comme prêtre, de son art exquis et d’un niveau exceptionnel.

Bach et Haydn auraient certainement consacré une bonne partie de leur œuvre à l’instrument de M. Sax, si l’histoire avait pu leur permettre de se réjouir avec nous de leur propre musique métamorphosée saxo‑phoniquement avec maestria par Ch. Grezes, M. Trillaud, E. Lopez et M. Delage (Quatuor Morphing) vendredi, à l’église luthérienne de la Trinité. Nous n’aurions jamais soupçonné les paysans danubiens de Marin Sorescu capables d’offrir tant d’émotions à leurs hôtes français, si les résonnances de la voix et du cœur de Stéphane Baroux n’étaient là pour accompagner, ainsi que la fraîcheur d’un accordéon et la clarté du toucher pianistique de Bogdan Bitica, le parfait mimétisme du sentir roumain transmis par la clarinette de Rémi Delangle, ainsi que la présence d’Odile Catelin‑Delangle, si précieuse pour façonner la sonorité du piano en clavecin, faute de quoi notre ami Rameau aurait jeté à terre sa lavallière…

L’exposition d’art, inaugurée entre deux concerts et conçue comme un « parcours émotionnel » dans les salons de l’élégant Hôtel de Béhague et à l’Institut Culturel Roumain, a ouvert les regards sur des œuvres de peinture et de sculpture contemporaines, exprimant sensibilités différentes, styles, références, horizons divers et unis, peut‑être, uniquement par le fait de représenter l’intuition personnelle d’une réalité spirituelle commune.

Avec la pièce « L’histoire des ours pandas racontée par un saxophoniste qui a une petite amie à Francfort », Matei Vişniec, un des auteurs les plus significatifs du théâtre contemporain, et toujours porteur dans ses œuvres d’une tension idéale, d’une résistance culturelle à la manipulation idéologique dans la lignée des grands noms de l’art dramatique du vingtième siècle, tel Pirandello, Ionesco ou Beckett, a été invité à poser son regard original, aigu, poétique, sur une histoire d’amour entre un homme et une femme, et leur union mystérieuse dans le mariage. Le théâtre encore, avec un spectacle dense en émotion, charismatique, conçu est réalisé par Iulian Negulescu dans les « catacombes » de Saint‑Sulpice sur le texte de Khalil Gibran Jésus le Fils de l’homme, mettant en scène la rencontre personnelle avec Jésus de soixante‑huit personnages (vivifiés par 33 comédiens sur 3 scènes concomitantes), a étonné, a ému, parlant à la connaissance et à la présence intime du Christ en chacun.

Aux cotés des artistes, des théologiens orthodoxes et des conférenciers ont accepté d’apporter au Festival leur soutien, leur contribution, leur témoignage. Dans le cadre festif du jardin du siège métropolitain de Limours, ouvert pour la circonstance à une suggestive exposition de sculpture monumentale, nous retiendrons, parmi les intervenants, le Père Vasile Gavrilă, professeur à la Faculté de théologie de Bucarest, venu de Roumanie pour présenter son dernier ouvrage sur le sacrement du mariage, spécialement édité pour l’occasion, en français et en roumain. La profondeur, la pertinence, la lucidité de sa vision sur le saint mystère du mariage ont trouvé une expression directe et vivante dans la conférence présidée par Son Eminence Monseigneur Joseph lui‑même et animée par l’auteur, aussi bien que par le Père Marc‑Antoine Costa de Beauregard, curateur de l’édition française. Le court‑métrage d’Eugen Leahu, La Myrrhe – Le sang de la rose, est venu compléter la triade des Sacrements de l’initiation chrétienne, par une suggestive présentation de la fabrication du Saint Chrême.

La Cathédrale métropolitaine des trois Saints Archanges en a reçu un quatrième, pour deux très courtes heures de conférence : Mère Siluana, nous rassurant par sa vigilance, nous émerveillant par la concision, la simplicité et l’humour immanent de ses propos. Il paraît que là‑haut les anges accompagnent d’une silencieuse symphonie le murmure de l’amour de Dieu, que nous pouvons entendre ici‑bas dans les Saints Sacrements de l’Église, en vertu de notre filiation divine. Paraît‑il aussi… que Dieu permet, de temps‑à‑autre, le bruit artistique et culturel d’un festival, pour que le silence qui survient soit d’autant plus écouté ou, mieux encore, pour que ce bruit s’imprègne d’harmonieuse résonnance divine.

Dans ce même cadre le public cinéphile a été honoré par Nunta de piatra (Noces éternelles) et Duhul aurului (L’esprit de l’or), deux films d’anthologie servis par l’expressivité du noir et blanc, gracieusement prêtés par Dan Pita ‑ réalisateur du film, avec Mircea Veroiu ‑ à notre festival pour illustrer sur celluloïd la beauté d’une époque, d’un pays, d’un thème et d’une manière de regarder la vie ô combien regrettés.

Le folklore roumain a également été l’invité de ce Festival, qui a eu le mérite de ne pas en faire, pour une fois, l’objet joli et insensible d’une kermesse, assurant une fonction fatalement décorative et accessoire, mais qui a su, au contraire, raconter, et sortir de chaque élément présenté les contenus religieux et les valeurs les plus profondes dont il est le porteur, laissant goûter une bribe de l’immense patrimoine spirituel vivant, conservé par la culture populaire. L’exposition ethnographique et anthropologique conçue et réalisée par Alexandra Marinescu‑Sav et par Constantin Cioc, bénéficiant des conseils d’Ileana Gaita, muséographe au Musée de l’Homme, est l’excellent résultat d’une telle approche rigoureuse, mais chaleureuse, conciliant les doctes interventions d’importants muséographes et anthropologues, les court‑métrages et films documentaires, avec le « concret spirituel » de chaque action rituelle liée aux noces. La « théologie paysanne » de Costion Nicolescu, chercheur ethnologue et théologien au Musée du Paysan roumain de Bucarest, a pris place avec douceur à la même table que les incantations magiques d’Ioana Andreesco, anthropologue et écrivain de référence en langue française, ayant pour troisième convive le symbolisme du costume traditionnel de noces, présenté avec émotion par Daniela Iancu, muséographe au Musée du Paysan de Craiova.

L’authenticité ethnographique et anthropologique du mariage, recherchée par Père Emilian Marinescu – conseiller culturel de la MOREOM ‑ et Alexandra, son épouse, organisateurs du Festival, a également été illustrée dimanche par le groupe traditionnel venu spécialement de Bixad (pays d’Oaş). Le professeur Iacob Pop, connu sur plusieurs continents pour sa volonté de préserver la culture traditionnelle de toute altération, a réussi une fois de plus à nous faire partager avec bonheur la tradition – nous donnant à tous le sentiment nourrissant d’être invités à de véritables noces – et à élever notre cœur au rythme des musiques et des danses interprétées avec fougue et joie manifeste par la trentaine de villageois. Souhaitons que le professionnalisme et la patience avec lesquels Eugen Leahu ‑ secondé par Alin Harfas ‑ a capté sur pellicule ces moments – comme d’ailleurs tous les autres instants du festival – soient couronnés par des réalisations artistiques et pédagogiques vidéo à la hauteur.

Sous la « baguette » managériale de Gheorghe Cârciu « din Sărbători » et avec son mécénat, cette dernière journée est devenue une fête dans laquelle, comme tout au long du Festival, Dieu a mis Sa volonté. La Divine Liturgie du matin nous a ouvert le cœur dans la joie, portés aussi par la psalmodie des chantres de l’église estudiantine de Bucarest Teodor Gavrilă, Ioan Dima et Ioan Hangu. Le « temps favorable » nous a été accordé, la nourriture abondante de même... Les presque deux mille personnes venues de tout l’Archevêché, et principalement de la région parisienne ont témoigné par leur présence des racines qui leurs sont propres et surtout d’une réalité dont la portée nous échappe souvent : le besoin de manifester foi, culture et tradition ensemble, comme membres d’un seul corps.

Cette première édition du Festival intitulé Pour l’amour de la beauté, propose donc une vision de l’art, et encourage un exercice de celui‑ci, comme terrain propice par excellence à la quête spirituelle des hommes, dans lequel l’artiste, semblablement à La mariée de Marc Chagall, qui aurait presque pu figurer dans l’exposition ethnographique roumaine, flottant dans les airs, traversant impassible un monde sombre et habité d’étranges créatures, pleine d’une vocation à la hauteur, d’une légèreté inspirée par la grâce, dans lequel l’artiste donc, offrirait humblement, par son talent et sa profondeur spirituelle, le don précieux de son « sentiment » de la beauté, et par elle, celui de son espérance, de sa foi dans le triomphe de la vie sur la mort.

Par P. Emilian Marinescu et Philippe Palini

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