Ajouté le: 5 Décembre 2011 L'heure: 15:14

En Terre Sainte avec Papa Costache

En Terre Sainte avec Papa Costache

On est sur le rivage de la Mer de Galilée1, juste à côté de la petite église qui commémore la rencontre du Seigneur avec les apôtres, après la Résurrection. C’est midi, il y a du soleil et il fait chaud. On met les pieds et les mains dans l’eau. Des dizaines de petits poissons nagent à nos pieds. A deux pas de moi, un vieillard, le dos un peu courbé, hausse son regard vers moi et j’ai l’impression qu’il garde tout son passé dans son regard, tous les êtres qui lui sont chers. Je l’entends murmurer : « Qui aurait cru que papa Costache allait venir ici à 86 ans ? » Il caresse l’eau de ses mains rugueuses, après il en met sur son cou et ses cheveux, délicatement, comme si s’était de l’eau bénie.

On ne peut pas ne pas remarquer papa Costache dans le groupe de pèlerins. La plupart l’aiment bien et l’appellent « le pépé ». Il est toujours assis près de père Cristi, le chef du groupe. Quelques uns se moquent un peu de lui, car il n’entend pas très bien. Mais lui, il ne se fâche pas. Il sait bien être un peu sourd, car il a travaillé pendant des dizaines d’années dans un atelier mécanique, dans un bruit monstrueux de marteaux et d’outillages. Quelques journalistes de diverses publications, invités par le Centre de Pèlerinages de Moldavie et de la Bucovine, essaient de lui faire dire quelque chose de sensationnel, afin d’avoir un bon article. Ils lui demandent comment il a réussi, avec une retraite de 600 lei2 par mois, à se payer ce pèlerinage. Il ne leur répond pas directement, mais un peu plus tard, dans le car, je l’entends dire avec son accent moldave: « J’ai tellement prié le bon Dieu, j’ai lu des psaumes et j’ai dit: Seigneur, j’ai rêvé de venir ici et mon rêve est devenu réalité ! »

Il y a diverses raisons pour lesquelles les gens se rendent en pèlerinage en Terre Sainte. Il y en a qui viennent car, disent‑ils, Jérusalem est le lieu où il faut aller au moins une fois dans sa vie. D’autres y vont car ils veulent voir des miracles: ils sont généralement fort déçus. D’autres encore ont des vœux qu’ils veulent voir devenir réalité: une dame a été très surprise par la complexité de certaines prières, car, disait‑elle, « moi je finis vite fait, je dresse une liste de mes demandes et j’espère que Dieu va accomplir au moins quelques unes ». J’ai vu, dans ce pèlerinage, des gens apparemment indifférents à la foi, qui pourtant percevaient l’importance des lieux visités, mais qui étaient paralysés par la peur de croire, car ils se rendaient bien compte du fait qu’en croyant ils allaient devoir changer leurs vies3.

Dans les yeux de papa Costache, « tous ces gens‑là sont croyants... à ce que j’ai vu... on ne voit pas de ceux qui aiment boire dans ce pèlerinage ». C’est pour cela qu’on ne peut pas le targuer d’arrogant lorsqu’il demande:

« Combien d’entre eux savent ce qui est arrivé dans ces lieux : Bethléem, Nazareth, Jourdain ? » Je crois que cela le rend triste de voir dans le groupe des gens qui « cochent » rapidement dans leur planning des lieux dont il a lu et qu’il a rêvé de voir pendant toute sa vie.

En repensant à lui, un souvenir ressurgit dans ma mémoire, souvenir qui m’a été confié par une de mes grands‑mères: son père est passé à la vie éternelle tandis qu’il lisait la Bible, assis à table. Et je me demande: et nous? Trouve‑t‑on encore le temps d’écouter Dieu nous parler dans les pages des Saintes Écritures, afin que, une fois arrivés en Terre Sainte, nous puissions nous réjouir en découvrant les lieux où a vécu un Ami4 très cher ? Pourra‑t‑on dire, comme papa Costache: « Voilà, j’ai vu de mes propres yeux les lieux dont j’ai lu dans les Saintes Ecritures... Maintenant j’y suis, mes pieds touchent le sol de ces endroits. »

Bogdan Grecu, Belfast

Notes :

1. Dans les Évangiles on l’appelle aussi Mer de la Tibériade ou lac de Guinossar.
2. 138 euros (NdT).
3. Le Christ Lui‑même a parlé de cette obstination (Jn 12, 40), en paraphrasant les mots du prophète Isaïe: « Écoutez, écoutez, et ne comprenez pas; regardez, regardez, et ne discernez pas. Appesantis le cœur de ce peuple, rend‑le dur d’oreille, englue‑lui les yeux, de peur que ses yeux ne voient, que ses oreilles n’entendent, que son cœur ne comprenne, qu’il ne se convertisse et ne soit guéri. » (Is 6, 9‑10).
4. Le Seigneur a dit: « Je ne vous appelle plus serviteurs, car le serviteur ne sait pas ce que fait son maître ; mais Je vous appelle amis, parce que tout ce que J’ai entendu de Mon Père, Je vous l’ai fait connaître. » (Jn. 15, 15).

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