Ajouté le: 26 Novembre 2015 L'heure: 15:14

La victoire qui a triomphé du monde : notre foi (1 Jn 5, 4)

« La foi n’est pas donnée à tous », écrit l’Apôtre Paul dans son Épître aux Thessaloniciens (2Th 3, 2). D’origine céleste, elle est un don de l’Esprit-Saint et en elle réside la puissance divine qui rend les hommes victorieux des séductions du monde, de ses dérives et de ses pièges manifestes ou cachés. Les multiples sollicitations du monde déguisées sous le leurre du besoin, suscitent l’adhésion du cœur de l’homme aux fausses valeurs par lesquelles le monde, comme un fleuve tranquille qui fait ruisseler ses flots, se succède à lui-même. L’Apôtre et Évangéliste Jean écrit à propos de la foi, « qu’elle est la victoire qui a triomphé du monde » (1Jn 5, 4). Et comme une arme de victoire, elle n’a pas été forgée sur la terre, mais dans l’atelier céleste des vertus divines, et elle assure en notre cœur « le plein épanouissement de l’espérance en Dieu qui ne déçoit point » (Rm 5, 5).

La foi est la libération de nos liens d’asservissement aux multiples sollicitations du monde

Le cœur de l’homme qui adhère à la foi, accueille sa puissance comme une arme victorieuse sur le péché et la mort. L’Apôtre Pierre nous révèle une telle puissance de la foi dans sa première Épître, en nous assurant que par elle « nous a été donné tout ce qui concerne la vie et la piété » (2Pi 1, 3). C’est la foi qui nous fait éprouver la divine puissance de « Celui qui nous a appelés par sa propre gloire et vertu » (2Pi 1, 3). Par elle, « les précieuses, les plus grandes promesses nous ont été données, afin que nous devenions ainsi participants de la divine nature » (1Pi 1, 4). La foi est le sceau de l’engagement de notre vie en Jésus-Christ. Cependant, en raison de l’inconstance de notre âme dans nos résolutions, le maniement de cette arme victorieuse requiert de nous une constante vigilance, car il est de notre ressort ou bien, d’effiler son tranchant ou bien de l’émousser par notre adhésion aux sollicitations et aux valeurs transitoires et sans lendemain du monde.

C’est la simplicité de la foi, plus forte que les démonstrations du raisonnement, qui atteste en notre cœur, les vérités divines. C’est par elle que chaque jour, nous nous corrigeons, que nous nous renouvelons, c’est par elle que nous nous sanctifions. C’est elle qui sauve l’homme comme nous en assure la parole véridique du Seigneur Jésus-Christ en différents passages de l’Évangile : « Ta foi t’a sauvé» (Mt 9, 22 ; Mc 5, 34 ; 10, 52 ; Lc 7, 50 ; 8, 48 ; 17, 19 ; 18, 42).

« La foi est la force de l’espérance et de l’amour »1 et elle « purifie et sanctifie la nature humaine encombrée et atteinte mortellement par le péché. Elle la renouvelle, la restaure […]. On ne peut être conduit à la perfection que par la foi parfaite, avec toutes les forces divines, avec toutl’armement spirituel donné par Dieu pour s’opposer aux passions de la chair, au monde et au diable.»2

Vivifiée par les énergies de l’Esprit, la foi est fortifiée par le souffle de vie de celui qui croit. Car notre propre souffle se porte garant en nos pensées, en nos paroles et en nos actes de la victoire de la foi, reçue et confirmée par notre proclamation de bouche et de cœur, lors de notre entrée dans l’Église et de notre incorporation au peuple des baptisés. Nous avons fait le choix de nous immerger en elle, afin de puiser les énergies vivifiantes de l’Esprit-Saint, pour en irriguer les sillons du champ de notre vie. La conformité de notre cœur par la foi, aux paroles de vie de l’Évangile, confère vigueur aux racines de l’âme et lui assure la victoire sur le péché, la mort et le diable.

« Tant que l’âme, dans sa foi en Dieu, écrit saint Isaac le Syrien, [n’a pas éprouvé] sensiblement la puissance de cette foi, elle ne peut être guérie de la maladie qui lui vient des sens, et elle ne peut fouler vigoureusement aux pieds la matière visible, qui lui ferme l’accès aux réalités intérieures et invisibles »3.

La Croix reçue par le croyant dans le sacrement du Baptême a scellé sa vie dans la Passion, la mort et la Résurrection du Christ, et la sainte Onction lui a conféré le sceau indélébile et le gage de la puissance de l’Esprit-Saint : « Nous tous qui avons été baptisés dans le Christ, proclame l’Apôtre Paul dans l'Épître aux Romains, c’est dans sa mort que nous avons été baptisés. Par le baptême, nous avons donc été ensevelis avec Lui dans la mort, afin que comme le Christ est ressuscité des morts par la gloire du Père, nous vivions, nous aussi, dans une vie nouvelle. » (Rm 6, 3-4). La puissance de l’Esprit a scellé notre corps par l’onction de l’huile du saint Chrême et c’est cette puissance qui fait resplendir en nos vies, le luminaire du Bois victorieux de la Croix sur le péché et la mort, en repoussant loin de nous les ténèbres séparatrices de l’adversaire.

La victoire de la foi

Comment nous est-il donné d’éprouver en notre vie la victoire de la foi ? Le Seigneur Jésus-Christ, en assumant, dans son Incarnation, notre humanité, a guéri tous les membres de la nature humaine qui, à cause du péché, avaient contracté un dysfonctionnement de leur motion naturelle. Il a guéri et unifié dans le creuset du cœur nos sens spirituels que l’inclination de notre nature au péché rend esclaves des passions4. Il les a libérés de leur asservissement afin qu’ils ne soient plus rivés à l’appétit des sens, mais recouvrent leur aptitude spirituelle d’avant la chute de l’homme.

Il a ouvert l’oreille de notre intelligence afin que nous puissions discerner les paroles de vie et de vérité dans les multiples flots des paroles du monde, répliques de celles que le serpent susurra dans le Jardin d’Éden aux oreilles d’Eve, et qui nous valurent par la désobéissance de nos premiers parents au commandement de Dieu, l’amère désolation de notre chute dans l’abîme du péché et de la mort. Le Seigneur Jésus-Christ a libéré nos yeux des écailles de notre cécité spirituelle (Act 9, 18), afin que nous puissions contempler, dès cette vie, le resplendissement de « la connaissance de la gloire de Dieu qui est sur la face du Christ » (2Cor 4, 6). Il nous a donné le goût et la saveur de l’Esprit-Saint et Il s’est offert Lui-même, en nourriture et breuvage de vie éternelle, afin qu’en Le savourant, nous trouvions en Lui nos délices. Il a ouvert devant nous la voie de la vie véritable, par les paroles de l’Évangile, afin que nous marchions sur ses traces.

Le Seigneur réprimandait Israël dans les oracles des prophètes en ces termes : « Ce peuple est près de moi en paroles et me glorifie de ses lèvres, mais son cœur est loin de moi » (Is 29, 13 ; cft Mt 15, 8 ; Mc 7, 6). Il ressort de cette réprobation divine que le Seigneur ne tient pas seulement compte des lèvres qui le confessent, puisque le cœur de l’homme peut ne pas adhérer à cette confession. Il ne tient pas non plus seulement compte de notre amour pour Lui, puisque cet amour peut ne pas resplendir dans nos actes, mais du bon vouloir de l’homme, c’est-à-dire de la volonté délibérée qui met tout en œuvre pour Lui préparer une place et pour l’accueillir avec une disposition de cœur qui sied à l’accueil de l’Époux de notre âme. Les obstacles à sa venue ne résident pas dans nos dispositions extérieures, mais en nous-mêmes, dans la manière dont nous nous percevons à nos propres yeux, dans notre complaisance à notre égard, dans les qualités et même dans les défauts que nous nous attribuons et qui donnent forme à l’idée que nous nous faisons de nous et par lesquels nous donnons consistance à notre propre néant, en lieu et place d’un renoncement à nous-mêmes pour nous recevoir tout entier de Dieu. « Il faut, écrit le Père Aimilianos de Simonos Petra, que nous nous vidions de nous-mêmes pour revêtir Dieu, tout comme Dieu s’est vidé de lui-même pour revêtir l’homme […]. Il faut donc que nous nous vidions de nous-mêmes, que nous sortions de nous-mêmes, que nous abandonnions notre moi. Il faudra en quelque sorte que nous échouions, que nous signions notre échec, car nos yeux sont embués par notre moi. Par conséquent, nous devons nous détacher de notre propre vision pour pouvoir nous remplir de la vision de Dieu, être en situation d’échec aux yeux de nos semblables, un être qui n’existe pas, un être réduit à rien (Cf 1 Co 1, 28), un déchet (Cf Ph 3, 8). Il faudra que nous devenions celui qui a échoué à ses propres yeux, car qui sait combien de projets nous avons échafaudés jusqu’à présent dans notre cœur, combien de châteaux y ont été construits et combien de rêves ont pris naissance en lui. Il faudra que nous délaissions tout cela sans violence, car personne ne peut se faire violence à soi-même. Il faudra que nous perdions notre moi, car « celui qui perdra sa vie » (Mt 16, 25), seulement celui-ci pourra la trouver uni à Dieu. »5 Comment alors pouvons-nous nous vider de nous-mêmes pour accueillir ce renouveau de vie qui nous est offert par le Christ ? Et que devons-nous accepter de perdre pour nous recevoir, tout entier de Dieu, renouvelé ? Ce sont assurément nos certitudes, nos évidences, nos habitudes souvent opposés au dessein de la miséricorde divine à notre égard.

La nature de l’habitude nous rend souvent aveugles à l’imprévu. Elle nous fait apprécier toutes situations nouvelles à l’aune de ce qui nous est familier, selon nos propres dispositions. Parnos habitudes nous faisons de notre propre mesure l’étalon de la mesure divine. Nous enfermons Dieu dans les limites de nos propres convenances. Comment pouvons-nous nous engager dans la perte de ces certitudes qui nous rivent à nous-mêmes ? En nous disposant, à chaque aurore de notre vie, à l’accueil de l’inattendu, de l’impensé et de l’imprévu avec une généreuse disponibilité du cœur. Car Dieu est le Tout Autre, Celui qui est incirconscriptible dans les limites de nos vues humaines, illimité dans le débordement des flots de son amour pour l’homme. Il est Celui que les rives de notre intelligence ne sauraient contenir. Incompréhensible dans les voies de sa divine providence. Dieu ne se laisse pas enfermer dans nos évidences, Il ne se laisse pas modeler par nos certitudes. Il vient à nous, comme dans la maison de Marthe et de Marie à Béthanie, réveiller Lazare endormi, c’est-à-dire notre âme assoupie et nous ressusciter du sommeil de la mort, nous dévêtir des oripeaux dont le monde revêt notre conscience, nous délier de nos bandelettes et nous conférer la véritable liberté. Aussi, devons-nous nous préparer à chaque situation nouvelle dans notre vie à Le rencontrer, le cœur nu et non habillé de nos certitudes. Que d’occasions de rencontre le Seigneur ne nous offre-t-il pas, dans nos épreuves, dans nos joies ainsi que dans nos peines. Ne devrions-nous pas, le cœur aux aguets et l’âme vigilante, discerner sa présence, dans notre joie comme dans notre souffrance et notre dénuement, dans les rencontres imprévues, dans la main tendue au détour du chemin à notre sollicitude ? Nous devons nous préparer à ces rencontres imprévues, en demandant à Dieu de rendre notre âme alerte et notre regard éveillé pour ne point rater ces rendez-vous que la providence divine a préparés pour nous, afin de pouvoir recevoir les jalons d’amour que le Seigneur nous destine et qui ne peuvent nous advenir que de la manière la plus inattendue en vue de la croissance en nos vies de sa divine Présence.

A notre Dieu, plein de sollicitude pour nous, et qui par son union à la chair de notre nature, nous a tout donné et rendus riches des trésors de son amour, à Lui, avec le Père et l’Esprit-Saint, la louange, l’honneur, la puissance et la gloire éternelle, maintenant et toujours dans les siècles des siècles. Amen.

Jacques Agbodjan, Paris

Notes :

1. Maxime le Confesseur, Lettres, II, trad. E. Ponsoye, Coll. Sagesses, Editions du Cerf, 1998.
2. Saint Jean de Kronstadt, Homélie pour le Premier Dimanche du Grand Carême, Le Triomphe de l’Orthodoxie, in Sermons orthodoxes, Archiprêtre Benjamin Joukoff, Coll. Sophia, Editions l’Age d’Homme, 2009.
3. Saint Isaac le Syrien, Discours ascétiques, 1, 7, trad. R.P. Placide Deseille, Monastère Saint Antoine le Grand-Monastère de Solan, 2006.
4. « Les passions constituent le plus bas degré atteint par l’être humain dans sa chute. Les mots grecs – πάθη –, latin – passiones – et français les désignant, renvoient à l’idée que l’homme sous leur emprise est passif, esclave. En effet, celles-ci annihilent la volonté, au point que l’homme passionnel n’est plus volontaire, mais bien au contraire, « contrôlé », « asservi », « porté par elles. » Dumitru Staniloae, Théologie ascétique et mystique de l’Église Orthodoxe, p. 95, Les Éditions du Cerf, Paris 2011.
5. Archimandrite Aimilianos, Catéchèses et Discours 2, Sous les ailes de la Colombe, p. 122, Éditions Saint Cénobion de l'Annonciation de la Mère de Dieu, Ormylia (Chalcidique), Grèce, 2000.

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