Ajouté le: 10 Décembre 2022 L'heure: 15:14

La lettre d’adieux de Saint Porphyrios de Kavsokalyvia (Athos)

Geron Porphyrios, maintenant canonisé, s’est endormi dans le Seigneur, il y a déjà 31 ans, le 2 décembre 1991.

La lettre qui suit, portant la date du 17 juin 1991, a été trouvée le jour de sa dormition dans son vêtement monastique destiné à son ensevelissement. Elle est une ultime preuve de sa très haute humilité.

Le texte de St Syméon le Théologien qu’il aimait particulièrement témoigne lui, de son amour prioritaire pour le prochain.

Enfin, le témoignage de son fils spirituel, ami et cardiologue, (+ Georgos Papazachos) révèle non seulement la clairvoyance mais aussi le sens aigu de l’humour de ce Saint qui, pourtant, souffrait d’une multiplicité de maladies et non des moindres avec douceur, calme et complet abandon à la volonté divine.

On peut le prier comme s’il était ‘dans la pièce à côté’ – ce qui était pour lui le passage de cette vie dans l’autre. Il est vivant et répond. Mais il ne faut pas s’y tromper, s’il semble au premier abord, un ‘bon Papouli’, son exigence spirituelle est immense…

Laissons-nous donc réchauffer par la foi de Saint Porphyrios qui est tout AMOUR.

Anne Monney

*  *  *

 

La lettre d’adieux de Saint Porphyrios de Kavsokalyvia (Athos)

« Mes chers enfants spirituels,

Maintenant que j’ai encore toutes mes facultés, je veux vous donner quelques conseils.

Depuis mon enfance, je suis pécheur. Quand ma mère m’envoyait garder les bêtes à la montagne, car mon père comme nous étions pauvres – était parti en Amérique travailler au canal Panama pour nous ses enfants – là où je faisais paître les bêtes, en épelant les mots, je lisais la vie de Saint Jean le Kalyvite et je l’aimais beaucoup et je priais beaucoup, en enfant que j’étais, entre douze et quinze ans, je ne me souviens pas exactement. Et en voulant l’imiter, après de nombreux combats, je suis parti secrètement de chez mes parents et je suis allé à Kavsokalyvia du Mont Athos, et je me suis soumis aux deux gérons Pantéleimon et Joannikios, qui étaient frères.

Il se trouva qu’ils étaient très pieux et vertueux, et je les aimais énormément et c’est pourquoi, grâce à leurs prières, je leur montrai une extrême obéissance. Ceci m’aida beaucoup, je sentis aussi un grand amour envers Dieu, et je passai de très bonnes années. Mais par la grâce de Dieu, à cause de mes péchés, je tombai gravement malade, et mes gérons me dirent de rentrer chez mes parents, à Saint Jean en Eubée. Et comme je suis pécheur depuis ma petite enfance et j’avais beaucoup péché, quand je retournai dans le monde, je continuai ces péchés, qui sont devenus très nombreux jusqu’à aujourd’hui. Les gens, cependant, m’ont regardé d’un bon œil et tous clament que je suis un saint.

Pourtant, moi, je me sens le plus grand pécheur du monde. Tout ce dont je me souviens, bien sûr, je l’ai confessé et je sais que Dieu m’a pardonné les péchés que j’ai confessés. Cependant maintenant, j’ai le sentiment que mes péchés spirituels sont très nombreux et je demande que tous ceux qui m’ont connu prient pour moi, parce que moi, lorsque j’étais vivant, très humblement, j’ai prié pour vous. Mais cependant, maintenant que je vais au ciel, j’ai le sentiment que Dieu me dira : « Qu’est-ce que tu viens faire ici ? » Et moi je n’ai qu’une chose à dire : « Je ne suis pas digne, Seigneur, d’être ici, mais que fasse pour moi ce que veut Ton amour. » Au-delà, je ne sais pas ce qu’il adviendra. Je désire, cependant, que l’amour de Dieu agisse.

Je souhaite toujours que mes enfants spirituels aiment le Seigneur qui est Tout, afin qu’Il nous juge dignes d’entrer dans Son Église terrestre incréée. Car c’est là qu’il faut commencer. J’ai toujours fait l’effort de prier et de dire les hymnes de l’Église, la sainte Écriture, et les vies des Saints, et je souhaite que vous fassiez de même. J’ai fait l’effort, par la grâce de Dieu, de me rapprocher de Dieu et je souhaite que vous fassiez de même.

Je vous supplie tous de me pardonner tout ce pourquoi je vous ai attristés. »

Hiéromoine Porphyrios, à Kavsokalyvia, 4/17 juin 1991

 

Saint Porphyrios insistait sur notre amour envers le prochain au point de le voir comme nous-mêmes – à une époque, il avait fait photocopier le texte suivant de Saint Syméon le Nouveau Théologien et le distribuait à tous ses visiteurs.

« Il est de notre devoir de considérer tous les croyants comme un seul, et de penser que chacun d’entre eux est le Christ. Et d’avoir pour chacun un amour tel que nous soyons prêts à sacrifier pour lui notre vie. Car nous ne devons ni voir ni considérer aucun homme comme mauvais, mais tous les voir bons. Si tu vois un frère tourmenté par une passion, ne le hais pas lui, mais les passions qui le combattent. Si tu le vois tyrannisé par ses désirs et des habitudes de péchés antérieurs, compatis plus encore pour lui, de peur que tu n’éprouves toi aussi la tentation, puisque tu es d’une matière qui tourne aisément du bien au mal. L’amour pour ton frère te prépare à aimer davantage Dieu. Car, si tu n’aimes pas ton frère que tu vois, comment est-il possible que tu aimes Dieu, que tu ne vois pas ? »

Témoignage de l’un de ses enfants spirituels, ami et médecin, cardiologue :

« Geron Porphyrios avait la patience de Job. Quand l’herpès envahissait la partie droite de son visage (le cuir chevelu, la joue, les oreilles et la mâchoire) c’était une plaie ouverte. Je lui demandai combien intense était la douleur. Il me répondit : ‘Comme si j’appuyais ma joue droite sur une poêle pleine d’huile bouillante.’ Il était complètement calme, il ne laissait pas soupçonner qu’il souffrait, pas même un gémissement. (…) Personne ne parlait tandis qu’on entendait ses lèvres murmurer avec une paix inimitable ‘ Seigneur Jésus-Christ, aie pitié de nous ‘. »

En tant que médecin.

« Sa spécialité était le "télé-diagnostic". ! Il voyait avec une étonnante exactitude les changements en lui-même et chez les autres, et souvent chez les médecins.

(…) Je rapporterai ici son auto-diagnostic. Il dépistait des variations dans son électrocardiogramme sans cardiographe. Un soir, il me téléphona inquiet : ‘Viens, même tard, et tu vas voir des altérations sur le cardiogramme. Aujourd’hui, j’ai eu mal plusieurs fois et la douleur est celle d’une angine de poitrine’.

J’ai réellement dépisté des changements ischémiques (…) et je lui demandai alors à quel stress il avait été soumis ce jour-là. Il commença à pleurer et à me décrire des scènes de bataille de rue en Roumanie. C’était le jour du soulèvement du peuple contre Ceaucescu. Avec son charisme, il voyait les révolvers et les morts sur les places comme les journaux l’ont publié les jours suivants. Il continuait à pleurer et je le suppliai de demander à Dieu de le soustraire un peu à cette vision. Son cœur se trouvait en danger par la tension, il pouvait faire un infarctus si elle se prolongeait.

Je me trouvais moi-même sujet de la même tension en voyant la sensibilité de l’« autre » cœur d’un Saint. Je détournais les yeux du cardiogramme et pensais : ‘Quelle importance ont pour toi, Geron, les médicaments nitreux contre l’angine de poitrine que je m’apprête à te donner ? Tu n’es pas de ce monde. Ton cœur bat à Oropos1 et vit en Roumanie. Sur l’électrocardiogramme, le cœur montre une situation ischémique (…) mais en réalité, il se trouve dans une grande ‘élévation’ auprès de Dieu’.

Je suis parti tard, dans la crainte, car j’avais vu un peu de la lumière d’un Saint.

(…) Un autre jour, j’étais triste, pensant que la plupart de mes années avaient fui sans but, dans des détails quotidiens inutiles. Geron téléphona et me ranima en deux ou trois phrases : ‘As-tu jamais entendu, Docteur, le ‘Ils ne goûteront pas la mort‘ ?2 Si nous voulons, nous pouvons éviter l’odeur de la mort. Il suffit d’aimer le Christ. Et toi de tout ton cœur, Monsieur le cardiologue.’ (Il rit) »

Extrait de Géron Porphyrios,
Témoignages et Expériences, 
Par Klitos Ioannidis

(Éd. du Saint Monastère de la Transfiguration du Sauveur-Athènes
Traduction de Sœur Joanna, monastère des Archanges, Jérusalem)

Notes :

1. Lieu du monastère de St Porphyrios.
2. Saint Luc, XII, 20.

La lettre d’adieux de Saint Porphyrios de Kavsokalyvia (Athos)

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