Le rayonnement de la Mission n’a pas été seulement le devoir des premières générations chrétiennes, elle est celui de toutes les générations. L’Église poursuit sa Mission malgré les hérésies qui la blessent et les persécutions qui la font souffrir. Le témoignage est l’expression de la vitalité de l’Église aussi bien qu’une source de renouveau.

Même si le travail missionnaire n’est accompli dans l’absolu que par des personnes qui en ont reçu la grâce, il n’en reste pas moins que le devoir de la Mission incombe à tout membre de l’Église, directement ou indirectement. C’est l’expression fondamentale de la spiritualité orthodoxe dont les deux pôles sont la Résurrection et la Pentecôte.

Le but de la mission n’est pas la conquête du monde ni la création d’un État chrétien qui aurait un pouvoir de contrôle universel, mais la transmission de la Parole et de la grâce de Dieu dans l’Esprit Saint, la Révélation de Sa gloire dévoilée en Christ et que nous attendons. Ce n’est pas l’accroissement d’une Église organisée, mais une diaconie offerte au monde, en toute humilité, pour son salut, c’est la manifestation de Dieu qui est Amour.

Puisque l’avènement du Royaume constitue la fin de l’histoire et que la condition nécessaire pour la Parousie est que la Bonne Nouvelle soit « proclamée dans le monde entier, en témoignage à la face de toutes les nations. Et alors viendra la fin » (Mt 24, 14), la mission tient une fonction essentielle dans l’histoire et a des dimensions eschatologiques.

Toutefois, la Bonne Nouvelle doit aussi atteindre les profondeurs de l’âme humaine afin de la transformer. L’Église s’accroît autant par l’intégration de nouveaux membres qu’en aidant les fidèles à acquérir une expérience plus profonde des mystères de la Vie et de l’Amour. Dans le premier cas, c’est une croissance quantitative, dans le second la croissance est qualitative. Et c’est cette seconde qui concerne la responsabilité pastorale de l’Église « organisant ainsi les saints pour l’œuvre du ministère, en vue de la construction du corps du Christ » (Ep 4, 12). Sans soins pastoraux, la première vie qui est plantée par le baptême et qui pousse en accueillant l’Évangile reste anémiée et se flétrit. Comme toute forme de vie, la vie en Christ doit vaincre la mort quotidiennement. La grâce et le péché, le progrès spirituel et les chutes dangereuses sont des conditions bien connues de nous tous. […]

La croissance qualitative de l’Église locale a des incidences missionnaires immédiates. Non seulement parce qu’elle contribue à la formation de ce corps sain et dynamique qui transmet spontanément l’Évangile à son milieu, mais également parce que la vraie foi et l’amour sincère d’un seul être humain ont des conséquences sur toute l’humanité, puisque tous les hommes partagent la même nature. Comme dit saint Séraphin de Sarov, « Trouve la paix intérieure, et des milliers d’hommes trouveront autour de toi le salut ». 

† Archevêque Anastase d’Albanie, Mission – Sur les traces du Christ, Éditions Apostolia, Paris 2021